
Laura Aguilar et Coeurage – Montréal
Mexicaine d’origine et résidente permanente du Canada depuis 2022, Laura est mariée et maman de quatre jeunes enfants. Elle a fondé Coeurage, une série d’ateliers dont le but est de soutenir les femmes qui vivent un deuil lié à la perte d’un bébé.
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Le Verbe : Comment cette œuvre est-elle née?
Laura Aguilar : À l’âge de 21, j’ai subi un avortement sans anesthésie. À l’époque, l’avortement était encore illégal au Mexique. Ç’a été extrêmement douloureux physiquement, mais aussi psychologiquement. J’avais très peur. Je venais d’entrer à l’université et j'étais une relation toxique et émotionnellement abusive. Mes parents auraient pris soin de l’enfant, mais je ne voulais pas. Je croyais que je n’avais pas d’autres choix que d’avorter.
Après l’avortement, je pensais que tout rentrerait dans l’ordre et que je reprendrais ma vie comme avant, mais non. J’étais très mal, très confuse. Je vivais un deuil très intense, très douloureux. J’ai perdu 10 kilos.
Je n'ai eu aucun soutien de mon entourage, je ne pouvais pas parler de mon deuil. J’étais donc seule et isolée. Je me voyais comme une mauvaise personne. J’avais tué mon enfant! Pendant plusieurs années, j’ai tenté de fuir dans l’alcool et la fête. J'ai rapidement enchaîné avec une nouvelle relation, mais ça ne fonctionnait pas. Ce n’était que pour fuir ma douleur.
Au Canada, quand j’ai commencé à parler un peu plus ouvertement de mon avortement, des femmes me disaient avoir vécu la même chose. J'ai réalisé que les femmes ont besoin d’exprimer ce qu’elles vivent.
Vous avez vécu plusieurs deuils liés à la perte reproductive, c’est pour cette raison que Coeurage offre plusieurs types d’ateliers?
Quand je me suis mariée en 2012, j’ai perdu mon bébé après dix semaines de grossesse. Je me suis dit que c’était Dieu qui me punissait. Mon passé me poursuivait.
Après cette fausse-couche, j’ai eu deux enfants, puis une autre fausse-couche, puis deux autres enfants. Je peux dire que, moi, la douleur de la perte reproductive, je connais! C’est dans toutes les fibres de mon corps.
À travers ces épreuves, les gens m’ont souvent dit des phrases toutes faites très blessantes, du style: «Oh! Tu as deux enfants déjà, ça va!», ou encore «Dieu sait ce qu’il fait!». Ce n’est pas voulu; ils ne savent pas quoi dire. C’est le cas de la majorité d’entre nous – nous ne sommes pas à l'aise avec le deuil.
En créant les ateliers Coeurage, c’est ce qui était important pour moi: sensibiliser les gens à la douleur du deuil périnatal, et être un lieu d’accueil et de soutien pour les femmes qui vivent ce deuil.
Je suis directrice générale du Centre des pertes reproductives depuis plusieurs années. Mes recherches m’ont permis de développer les ateliers Coeurage. Mais ceux-ci ne sont pas abrités par le centre. Je les ai voulus vraiment laïcs, sans appartenance religieuse. Je crois sincèrement que Dieu m’a donné cette mission. Oui, je suis catholique, mais Coeurage n’est pas religieux, car c’est ainsi que nous pourrons aider le plus grand nombre. Toutes les femmes, quelles que soient leur croyance ou leur non-croyance, ont besoin de soutien.
Nous offrons quatre sortes d’ateliers de soutien : fausse-couche, mortinatalité et perte d’un nourrisson; deuil après un avortement; deuil après le placement en adoption, et finalement le deuil à cause de l’infertilité et de la stérilité.
Ce programme est celui dont j’aurais voulu bénéficier quand j’étais jeune. Dans le deuil périnatal, je crois que les femmes doivent prendre soin les unes des autres, c’est une nécessité. Ça fait partie de notre devoir de femmes; nous avons tout ce dont elles ont besoin!»
Au Québec, 23 000 familles sont touchées par le décès d’un bébé chaque année. Les ateliers peuvent se vivre individuellement ou en couple. Ils sont offerts en anglais, en français et espagnol, et ce, gratuitement pour les personnes de tout âge, sexe, religion et origine.
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