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La gnose et les complots
Les théories du complot sont actuellement presque aussi virulentes que la Covid-19. De plus en plus d’adeptes issus de milieux divers adoptent une méfiance radicale envers les autorités civiles et les médias. Comment comprendre ce phénomène ? Un concept, tiré des boules à mites de la civilisation occidentale, peut nous aider : la gnose. Dans un article récent, appréciable à plusieurs égards, le philosophe Martin Steffens qualifiait de gnosticisme certains réflexes élitistes de l’Église catholique en temps de pandémie : utilisation de la technologie pour pouvoir assister à la messe, avantage implicite aux plus jeunes, aux plus rapides, etc. À mon avis, ce versant négatif de
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Saint Jude au coeur de la pandémie
« Rien ne peut arriver sans que Dieu le veuille. Et tout ce qu’Il veut, si mauvais que cela nous paraisse, est vraiment meilleur.» – Tiré de l’ultime lettre de saint Thomas More à sa fille ainée Saint Jude est le patron des causes désespérées ou difficiles, il est certainement le nôtre pour une raison ou une autre. Si la pandémie exaspère et fait d’autant plus ressortir notre condition précaire en ce bas monde, il n’en reste pas moins que le véritable tourment ne semble pas être là. Devant les malheurs des Galiléens massacrés par Pilate et ceux des Hiérosolymitains écrasés
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Emanuel, le padre de la joie
Confinement ou pas, Emanuel Zetino, le plus jeune prêtre du diocèse de Montréal, célèbre la messe à la cathédrale de Montréal chaque matin en direct à la télé. Tout de suite après, on peut le voir danser sur TikTok dans la sacristie, faire un meme avec son encensoir ou chanter « Aqui Estoy » sur le parvis de l’église. À 16 ans, il avait décidé d’être heureux et toujours joyeux. 20 ans plus tard, il tient promesse. Né à Montréal de parents immigrants guatémaltèques, il ne le cache pas : il a toujours voulu être prêtre. « Comme beaucoup de Latinos, mes parents étaient très pratiquants
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La Minuit, un roman au gout du jour ?
Écrit dans une langue magnifique, avec un style à la fois riche et sévère, à l’image de la nature de notre pays, La Minuit de Félix-Antoine Savard est un roman sur l’homme trompé par un espoir de salut temporel, mais sauvé par le rappel de la mort et de l’espérance qu’elle fait naitre du salut éternel. Retour sur un livre injustement oublié. Le roman Menaud maitre-draveur est considéré comme le chef-d’œuvre de Félix-Antoine Savard. Avec Maria Chapdelaine de Louis Hémon, il est l’archétype de ce que les historiens de la littérature québécoise ont appelé le « roman du terroir ». Cette étiquette colle parfaitement à Menaud maitre-draveur, qui exalte un
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Apologie du journalisme chrétien
Un chrétien est dans le monde mais pas du monde. Le journalisme chrétien devrait refléter cet état. Car c’est seulement par le biais de cet écart, qui est distance et relation, qu’il est à même de rendre compte du monde. Ce faisant, cette quête de vérité en fait un témoin par excellence. Que signifie être un journaliste chrétien et quelles en sont les implications ? Est-ce qu’on parle de couvrir l’actualité religieuse chrétienne, la vie de l’Église, les débats de société qui concernent les chrétiens, les controverses théologiques, la vie paroissiale ? Ou plutôt, et selon la formule johannique qui veut qu’un
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Guide pratique pour une saine censure
On l’a vu dans les dernières semaines, les mots et les images ont un poids. Ils sont chargés. Ils pèsent sur les nerfs tendus de notre équilibre émotif. Les mots mettent en colère. Que ceux qui ont pour occupation de mettre des idées sur une feuille se le tiennent pour dit. Il suffit d’une minute d’inattention et on se met les pieds dans les plats. Ou pire. Ce sont toutefois deux choses bien différentes que de connaitre les tabous et de les éviter en toute circonstance. Pour ce faire, il est absolument nécessaire d’exercer une vigilance sans faille. Petit exercice
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Mon cousin Mgr Bourget
Il y a quelques années, j’ai fait l’arbre généalogique de ma famille. J’y ai découvert plusieurs agriculteurs, des soldats, un marin, une lignée de notaires et… un évêque ! Mgr Ignace Bourget (1799-1885), second évêque de Montréal, est un cousin éloigné du côté paternel de ma famille. Tout comme moi, il est un descendant de Guillaume Couture (1618-1701), fondateur de la ville de Lévis. Il ne m’en fallait pas plus pour courir me renseigner sur ce personnage historique ! La situation de l’Église après la conquête britannique Avant de parler de Mgr Bourget, il convient de se pencher brièvement sur la période s’étalant de
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Aider à vivre plutôt qu’à mourir
Depuis le 19 octobre dernier, une déclaration contre le projet de loi C-7 circule sur Internet et les médias sociaux. Au moment d’écrire ces lignes, 771 médecins à travers le Canada l’ont signée. Le projet de loi C-7 propose des changements à l’actuelle loi fédérale sur l’aide médicale à mourir. Ces modifications élargiraient les critères permettant aux malades déclarant vivre avec des douleurs insoutenables d’avoir accès à l’euthanasie. Le docteur Pascal Bastien, chef de division en médecine interne générale à l’Hôpital général de North York et membre de la branche torontoise de la Fédération canadienne des sociétés de médecins catholiques, explique au Verbe pourquoi
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Le Liban : entre cèdre et croix
Tout est dans la Croix, et tout consiste à mourir – Imitation de Jésus-Christ, II, 12 Un peu plus de deux mois après la terrible explosion qui a secoué le centre-ville de Beyrouth, je voulais rendre hommage à ce pays dans lequel j’ai vécu près de quatre ans en vous racontant en quoi ses gigantesques cèdres millénaires sont intimement liés à un élément central du christianisme : la croix. Le 14 septembre de l’an dernier, je me trouvais avec un groupe d’amis dans le village de Bcharré au nord du Liban. Nous avons alors célébré la fête de la Croix glorieuse
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J’ai été humiliée
Le 8 octobre 2018, j’ai vécu un sacrement du pardon qui a changé radicalement ma vie. Étant à Florence depuis environ un mois pour mes études doctorales, je me suis confessée à un prêtre, choisi au hasard, durant une soirée de prières. Au milieu de la confession, il m’a regardé droit dans les yeux et m’a dit, les yeux pétillants et le sourire aux lèvres, que je devrai en priorité devenir humble. « Il va falloir que tu redeviennes comme un petit enfant. » « Si vous ne changez pas pour devenir comme les enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux. »
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Le civisme, vous connaissez ?
Depuis le début de la pandémie, les Québécois ont régulièrement été appelés à faire preuve de civisme. Très peu usité avant l’apparition de la COVID-19, ce mot est maintenant entré dans le vocabulaire du gouvernement. Aujourd’hui, rares sont les conférences de presse où il n’est pas prononcé. Le Verbe a rencontré des chercheurs et des acteurs du milieu afin d’en savoir davantage sur cette notion qui remonte aussi loin que la démocratie athénienne. « Je suis très heureuse de voir les Québécois voyager au Québec, par contre une minorité de touristes a oublié le respect et la politesse de base. Je
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Course folle à la perfection
Lorsqu’arrive la trentaine, on regarde en arrière et on se rend compte de tous les rêves éteints, de toutes ces aventures manquées, de toute notre imperfection. Mais cette course folle à la perfection à laquelle nous incite notre société est-elle justifiée ? Pour commencer à être bon, ne vaut-il pas mieux de sortir de la folle logique de l’utilité et accepter notre humanité ? « On ne voit pas le temps passer », écrivait Jean Ferrat. La vie va vite. On est bousculé par le temps, on court après l’argent, on provoque des rencontres virtuellement. Éternel insatisfait, l’être humain cherche à avoir toujours plus.
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Un voyage de noces… en Gaspésie
En mars dernier, mon mari et moi ne savions pas si nos plans de nous marier le 5 septembre 2020 allaient bien tourner. Après de longues discussions, nous nous sommes dit : confinement pas confinement, à cinq ou à cent, nous nous marions. Heureusement, nous avons pu inviter tous nos proches à la cérémonie, avec les mesures sanitaires appropriées, et avons même pu avoir nos familles et quelques amis à notre réception. Nous avons été comblés, alors que de nombreux autres couples ont vu leurs espérances être bien plus réduites, ou ont carrément choisi de reporter à l’an prochain. Comme nous
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Ces femmes tissées serrées : le Cercle des fermières de Beauceville
La réunion mensuelle du Cercle des fermières de Beauceville commence dans l’effervescence. Louise Boucher, présidente, obtient difficilement le silence. L’ordre du jour est chargé : introduction des nouveaux membres, présentation des activités à venir, dégustation de tire d’érable à la pause. Pour lancer la rencontre, François Proulx, séminariste stagiaire à la paroisse, partage une prière qui se termine par ces mots : Combien de mailles comportera le tricot de ma vie ?Dieu seul le sait.Père, donne-moi le courage de terminer mon tricot afin que tu le trouves digne de l’exposition éternelle. Un peu plus de cent ans après sa fondation, en 1916, le
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Une soucca en basse-ville
J’ai rencontré Paul en 2011, au moment où j’ai emménagé dans mon premier appartement. Il était mon voisin d’en dessous. Le premier soir, ma laveuse a eu un problème qui a provoqué un dégât d’eau dans son logement. J’étais loin de me douter que dix ans plus tard, je partagerais encore, de temps en temps, un café avec lui. Quand il m’a invitée pour la fête de Souccot, je n’ai pas hésité. Afin de revêtir notre rencontre d’une aura de légalité, j’ai mis mon chapeau de journaliste et me suis rendue sur la rue Bayard, dans la basse-ville de Québec.
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Excursion au pays de l’extraordinaire
Alors que le tout nouveau livre de Mathieu Bélisle est paru au début du mois, je vous propose de revenir sur son précédent essai, Bienvenue au pays de la vie ordinaire, paru en 2017. Avec tout l’intérêt que j’ai porté à ce livre, les idées ne manquaient pas pour entrer en dialogue avec lui. L’espace me contraignant à choisir, j’ai jeté mon dévolu sur une affirmation qui m’interpelle particulièrement. Elle concerne le caractère « ordinaire » de la littérature au pays de la vie ordinaire. En bref, notre littérature (lorsqu’elle possède des qualités littéraires) n’offrirait jamais de cheminement spirituel. Au pays de la vie ordinaire
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Thérèse d’Avila et l’aventure de la grâce
À ma sœur Geneviève pour son anniversaire « Quien a Dios tiene, nada le falta. Sólo Dios basta. »« Celui qui a Dieu ne manque de rien. Dieu seul suffit. » (Vers écrits par sainte Thérèse d’Avila dans son bréviaire.) Beaucoup de gens qui ont essayé de lire les écrits de sainte Thérèse d’Avila se sont vite découragés. Souvent désemparés, on se sent bien loin de la réalité mystique et spirituelle qu’elle relate. Du moins, c’est ce qui semble à première vue. Elle-même se sentait bien impropre à écrire sur Dieu et sur la relation que l’âme entretient avec Lui. Si elle finit tout de
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Le prêtre catholique oublié qui a découvert le bigbang
George Lemaître est peut-être l’un des trois noms les plus importants de la cosmologie au 20e siècle, aux côtés d’Albert Einstein et d’Edwin Hubble. Or, son nom est largement oublié des manuels d’histoire des sciences. Heureusement, c’est en train de changer. Si on demandait aux gens de nommer une seule des grandes théories scientifiques du 20e siècle, celle du bigbang arriverait probablement en tête de liste. Tout le monde connait l’expression et sait à peu près de quoi il en retourne : une explosion cosmique initiale qui a donné naissance à tout l’univers qu’on connait. Boum ! Et treize milliards d’années plus tard, on
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L’exode et l’exil
Je n’ai vécu qu’une seule expérience d’exode dans ma vie. J’étais alors à Paris pour mes études en philosophie. Au début, j’étais sous le charme. Les cafés et les Champs-Élysées, la pyramide du Louvre et les jardins du Luxembourg, la Comédie française et l’opéra Garnier. Je m’émerveillais de l’architecture de chaque bâtiment, de l’histoire de chaque avenue, des connaissances de chaque citadin. Paris m’avait […] délivré. Délivré du mépris inavoué de ma propre patrie, délivré de l’illusion que bonheur rime avec ailleurs. Les premières amours passées, je suis durement entré en choc culturel. J’expérimentais le stress et la désorientation vécus
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Fratelli tutti : quand le pape joue de la musique
Le pape François a publié sa lettre encyclique Fratelli tutti, sur la fraternité et l’amitié sociale, le 3 octobre dernier, veille de la fête de saint François d’Assise. Toutes et tous — frères et sœurs ! À la différence des journalistes de divers médias, je n’ai pas eu l’occasion d’accéder au texte « sous embargo », ce qui signifie recevoir le texte sans possibilité d’en parler avant la date de parution. Comme chacun, j’en ai pris connaissance seulement le 4 octobre. Pour m’approcher de ce texte généreux — le pape aime écrire, et je crois savoir pourquoi —, je vous suggère l’angle évoqué de la
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Ces fausses images de la maladie mentale
Qu’il fasse œuvre de fiction ou qu’il s’inspire de faits réels, le cinéma déforme souvent la réalité afin de la rendre plus attrayante pour son public. Ce dernier s’en trouve généralement satisfait. Cependant, lorsque les réalisateurs s’inspirent des maladies psychiques graves et permanentes pour produire leurs films, les conséquences peuvent s’avérer dramatiques. Si l’on fait abstraction des différents symptômes dont souffrent les personnes atteintes de maladies mentales, ce qui les handicape le plus lourdement, ce sont surtout des réalités comme le regard des autres et les préjugés. Or, la télévision et le cinéma, avec leurs téléséries et leurs films, véhiculent
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Jusqu’aux limites du monde
Confins. Du latin confinium : « frontières ». Le Grand Confinement a eu l’heur de nous poser bien des questions, dont celles que je retiens ici : quel rapport entretenons-nous avec les lieux que nous habitons, avec ceux où nous nous réunissons pour travailler, avec ceux où nous prions en communauté ? Les limites qui bordent ces espaces sont-elles des entraves étouffantes ou un cadre duquel nous pourrions tirer grand profit ? * L’enjeu des limites, des frontières — ou parfois de leur absence — est peut-être l’un des plus formidables pour penser notre époque. Nous la pensons, cette époque, si souvent en termes relatifs au temps :
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Joyce, la lumière d’un peuple
En 2018, je participe à un pèlerinage à Medjugorje avec une trentaine d’Attikameks de Manawan. Les côtoyer m’ouvre les yeux. Je ne connais pas ces Autochtones qui vivent à quelques centaines de kilomètres de chez moi. J’y découvre un peuple de cœur. Un peuple d’une piété sans mesure qui passe des nuits blanches à prier et à chanter. Un peuple généreux qui achète des statuettes et des chapelets par centaines pour les absents du voyage. Car derrière chaque Attikamek, il y a une communauté. Et dans le cri de Joyce Echaquan, le cri d’un peuple. J’attrape de justesse Manon Ottawa au
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Alexis Cossette-Trudel et le danger de QAnon
Facebook a pris hier la décision de fermer le compte d’Alexis Cossette-Trudel, un adepte du groupe complotiste QAnon et un des porte-paroles du mouvement de contestation des mesures sanitaires. Cette étoile montante des réseaux sociaux participe à un phénomène politique qui dépasse largement les enjeux liés à la crise de la Covid-19. Sa chaine YouTube, Radio-Québec, compte maintenant près de 120 000 abonnés ; ce chiffre a quadruplé depuis le début de la crise et il augmente de façon continue. Sa vidéo la plus virale a été vue par plus d’un demi-million de personnes, ce qui a poussé Radio-Canada à publier un article
