Nos articles
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Gérard Raymond, mystique et serviteur de Dieu
Certaines lectures ont le pouvoir de nous changer profondément. C’est ce qui m’est arrivé après avoir dévoré en trois jours le journal de Gérard Raymond (1912-1932). Au moment d’en entreprendre la lecture, je ne pensais pas y découvrir un grand mystique. Le jeune Gérard avait entre 15 et 19 ans quand il a rédigé les cahiers qui forment le journal. Il avait pour devise Quid nunc Christus (faire maintenant ce que le Christ ferait à ma place), ce qui donne d’emblée le ton. Gérard mentionne sans cesse son désir de se dévouer entièrement au Christ en devenant prêtre, ou même martyr, après ses études au
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Patrick Duffley : « La révélation, c’est une personne ! »
Professeur de linguistique de l’Université Laval à Québec, Patrick Duffley s’intéresse aux rapports étroits entre langage et christianisme. Puisque « le Verbe s’est fait chair », nos paroles humaines peuvent nous aider à mieux comprendre la Parole divine. Le « nom de Dieu » est un thème récurrent dans la bible. Pourquoi toute cette importance accordée à un nom ? Le nom de Dieu révélé à Moïse exprime son essence : « Je suis celui qui suis. » C’est une révélation intime de la personne. Le nom, c’est aussi ce qui permet d’interpeler l’autre. Si je connais ton nom, alors je peux t’appeler. Le nom permet la connexion
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Un embryon pour le ciel
« Ce que je veux dire aux mamans qui ont perdu des enfants, c’est cela : nous avons été mamans, nous avons reçu ce don. Le temps n’importe pas : un mois, deux mois, quelques heures… Ce qui compte, c’est le fait que nous avons reçu ce don. Un tel don ne s’oublie pas. » – Chiara Corbella Quand j’ai appris que j’étais enceinte, un peu après la Pentecôte, j’ai ressenti une grande joie, non sans toutefois une certaine angoisse. « Un autre ? Le premier n’a que huit mois et je suis déjà tellement fatiguée. Comment ferons-nous ? Deux pauvres étudiants en philo sans travail fixe
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Rod Dreher : « Si nous ne sommes pas prêts à souffrir, nous sommes perdus »
*Dans un monde de plus en plus fragmenté et polarisé, Le Verbe médias s’engage à bâtir des ponts au service de la communion. Apprenez-en plus sur notre ligne éditoriale, qui prône un dialogue ouvert et la diversité d’expression, tout en cherchant l’unité dans la vérité et la charité. Rod Dreher est parmi les commentateurs chrétiens de tendance conservatrice les plus connus en Occident, du moins aux États-Unis. Il s’est surtout fait connaitre outre-mer avec son livre Le pari bénédictin, qui propose une réflexion sur l’avenir des chrétiens en Occident. Il a accepté de répondre à nos questions sur son dernier ouvrage, Résister au
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Hiroshima: le feu qui dévore
6 aout 1945. 8 heures, 16 minutes et 2 secondes. Le feu atomique rase instantanément les trois quarts des bâtiments de la ville d’Hiroshima, au Japon. 75 000 personnes, presque toutes des civils, meurent sur le coup. 50 000 autres vont mourir des conséquences de blessures diverses et de l’exposition aux radiations dans les trois semaines suivantes. Jamais dans notre histoire multimillénaire l’humain n’avait causé une telle destruction. Le choc est tellement fort qu’il ne reste absolument aucune trace des bâtiments et des gens qui se trouvaient dans un diamètre de 500 mètres du point d’impact. Vous avez bien lu, 500 mètres, un
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Saint Dominique et les chiens du Seigneur
L’Église, et spécialement l’ordre des Frères prêcheurs, fêtaient il y a deux jours le 800e anniversaire de la « naissance au ciel » (dies natalis) de saint Dominique. C’est cependant le 8 aout que l’on célèbre sa mémoire depuis le concile Vatican II : double fête pour nous, donc ! Peu de gens connaissent la vie de Domingo Núñez de Guzmán (1174-1221), ce religieux castillan qui a révolutionné le Moyen Âge en le persuadant que le Verbe incarné avait encore quelque chose à dire à une société chrétienne exaspérée. Il a offert à nouveau le christianisme aux chrétiens désabusés et aux hérétiques échauffés. À l’instar de son coreligionnaire ombrien
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Les Fils : la soif de justice des prêtres ouvriers
Pointe-Saint-Charles, années 60. Un quartier ouvrier de Montréal aux conditions de vie insalubres. Des familles qui s’entassent dans des logements trop petits, parfois mal isolés ou sans eau chaude. Un tiers des résidents du quartier est sur l’aide sociale, l’autre portion travaille en usine pour des salaires crève-faim. « Quand j’étais enfant, mon rêve était de quitter Pointe-Saint-Charles », nous confie un des protagonistes du film Les Fils de Manon Cousin qui nous plonge dans l’univers de ce quartier populaire montréalais. Grâce aux centaines d’heures de visionnement d’archives de l’ONF, la réalisatrice nous fait remonter le temps par une sélection d’images qui parlent d’elles-mêmes : l’innocence
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Signes religieux : l’habit fait-il le moine ?
Dans le Québec laïque d’aujourd’hui, le religieux qui porte son habit sur la place publique ne passe pas inaperçu. Lorsque j’ai fait mon entrée dans l’Ordre des Dominicains, j’ai rapidement été amené à me poser la question suivante : « Quand et pourquoi devrais-je le porter ? » Si plusieurs religieux ne portent plus l’habit de manière régulière ou appartiennent à des communautés qui ne le portent plus, on observe depuis quelque temps un certain retour de celui-ci. Pratiquement toutes les communautés nouvelles ont un habit religieux. Quant aux ordres dits « anciens », leurs membres plus « jeunes » expriment souvent le désir explicite de le porter.
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Au sanctuaire des bouquins
Aux abords du Saint-Laurent, au Juvénat Notre-Dame à Saint-Romuald, se niche la librairie Secours-Missions. Contre les vents et marées de la révolution numérique, cette bibliopole à vocation culturelle, spirituelle et missionnaire subsiste telle une épave d’une qualité rare et précieuse. Le réverbère allumé est le signe que le frère Blanchet est présent. Les habitués savent qu’il l’est du lundi au vendredi, presque tous les jours de l’année, depuis 25 ans. Il faut franchir deux portes d’un gris délavé puis descendre quelques marches en béton pour le rencontrer. Le religieux de la communauté des Frères de l’Instruction chrétienne est fidèle à son
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Les antécédences : ce que l’État peut et ne peut pas
À l’heure du passeport sanitaire et des états d’urgence successifs, au moment où l’obligation du vaccin se profile, il est bon de se demander ce que l’État peut légitimement imposer aux citoyens. La période que nous traversons exige que nous prenions la mesure de l’emprise, sur nos vies, des puissances financières, technologiques et politiques. L’emprise est totale et quotidienne : le plus petit geste est conditionné par une banque, formalisé par une « appli » et réglé par un État. Mais, pour ce qui est de ce dernier, une chose diffère : si les lois du marché nous échappent et que nul n’arrête plus le
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Marius Dubois : l’audace du religieux
En cette fête de sainte Anne, Emmanuel Lamontagne nous propose de découvrir Marius Dubois (1944-2016), l’un des principaux artistes ayant contribué au décor du sanctuaire de Beaupré. Il faut le dire en toute franchise, Marius était une sorte d’ovni dans le monde artistique de son époque. Alors que la vaste majorité de ses confrères artistes s’intéressaient au modernisme et à l’abstraction, lui se voyait comme un successeur des peintres de la Renaissance italienne. Grand adepte du symbolisme, Marius aimait évoquer les réalités subtiles et les sens cachés. Il faut admettre qu’il y a quelque chose d’extrêmement audacieux dans le fait de
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Patience et « langueur » de temps
Hormis les travailleurs de la santé et les livreurs d’Amazon, nombreux sont ceux qui ont eu l’impression de passer la dernière année à attendre : attendre la réouverture des salles de classe ou des salles à manger, attendre pour se faire tester ou vacciner, attendre pour se visiter ou pour voyager. Notre rapport au temps s’est allongé et notre patience a été plus d’une fois éprouvée. Pourtant, avant les mesures de guerre sanitaire, les jeux de démineur et de patience avaient perdu la cote. Résignation facile des faibles pour les uns, vice bourgeois du statuquo pour les autres, cette vertu d’un autre
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Pèlerins de Compostelle : quand le chemin se confine
Il y a autant de raisons de partir que de pèlerins. Autant de pèlerins que de chemins. Et autant de chemins que d’êtres humains. Il y a donc autant de raisons de partir que d’êtres humains. Et puis un jour, il n’y en a eu qu’une, rien qu’une seule. Une obligation de rester. De ne pas sortir. De balancer de l’infini de la route à la finitude de l’espace de nos appartements. Et puis un jour, il y a nous. Nous tous. Seuls, avec l’autre. Confinés, comme l’autre… comme le pèlerin en chemin. Mais quand le chemin se confine, le cheminement se
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Les corps intermédiaires
Ce sera notre petit secret. Il m’arrive parfois, à la manière des gens qui se projettent dans d’inaccessibles fantasmes pornographiques, de regarder des philosophes débattre sur YouTube. L’autre jour, l’un d’eux rappelait que, pour la philosophe Hannah Arendt, l’État totalitaire avance en taille et en vigueur au fur et à mesure que les corps intermédiaires s’éclipsent. (Non, un corps intermédiaire n’est pas l’oreiller que votre épouse place entre elle et vous, tel un infranchissable récif corallien, pour éviter que vos pieds froids atteignent ses mollets sous la couette.) Les corps intermédiaires sont ces groupements humains – la famille, l’association du
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Pèlerins et touristes : une cohabitation nécessaire
Pendant que les paroisses sont désertées et les églises démolies, les grands sanctuaires du Québec sont investis par des masses de touristes en quête de beauté et d’authenticité. Chaque année, c’est en moyenne quatre-millions de visiteurs qui se relaient dans ces lieux souvent boudés par les locaux. Tendance lourde dans l’industrie, le tourisme religieux est appelé à croitre. Pour les responsables d’Église, cet afflux représente autant un défi qu’une occasion favorable. Claude Grou a été recteur de l’Oratoire Saint-Joseph du mont Royal pendant quinze ans. On visite pour différentes raisons ce sanctuaire qui abrite le tombeau de saint frère André :
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Le solitaire sociable
Vous en aurez peut-être rencontré un durant le dernier confinement : un érudit qui se vante de son amour de la solitude et se lamente de l’incapacité des « petites gens » à faire comme lui. Le même qui se plait à citer Blaise Pascal, affectant toujours bien sûr un petit air de dépit : « J’ai dit souvent que tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre. » Certains ont même profité du long confinement pour soutenir que l’homme véritablement accompli n’est pas par nature sociable. L’ennui et non la nature, a-t-on écrit durant
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J’ai déjà été apostat (juste une fois au chalet)
« Il n’y a même pas cent personnes dans ce pays qui haïssent l’Église catholique. Mais il y en a des millions qui haïssent ce qu’ils pensent à tort être l’Église catholique » – Fulton Sheen L’apostasie fait de nouveau la manchette au Québec. Fidèle à son cycle d’à peu près trois ans, elle refait surface chaque fois qu’un scandale ou une polémique concernant l’Église catholique vient alimenter la machine médiatique. Ces jours-ci, c’est en raison des pensionnats autochtones. Je pense que c’est on ne peut plus légitime que des personnes veuillent contester leur appartenance à une institution à laquelle ils n’adhèrent pas ou
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Ces milliardaires qui veulent monter au ciel
Dimanche dernier, à 71 ans, le milliardaire Richard Branson a fait un vol touristique d’une quinzaine de minutes dans l’espace. Plusieurs admirateurs y voient le signe d’une « nouvelle ère spatiale ». Le fondateur de Virgin n’est pas seul dans cette course et industrie galactique. Le président d’Amazon, Jeff Bezos, doit lui aussi s’envoler le 20 juillet avec son propre engin créé par sa société Blue Origin. Le père de PayPal et Tesla, Elon Musk, a pour sa part prévu de décoller avec sa compagnie Space X en septembre prochain. Ce sont des centaines de vols par année que ces trois compagnies souhaitent offrir sous peu…
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Serge Bouchard : une voix, le soir
Une voix impossible à oublier. Grave, chaude, juste. Servie par un propos cohérent, structuré, clair ; des réflexions simples mais riches, imagées. Un personnage aussi dont il savait jouer : chapeau à la Indiana Jones, barbe blanche, œil perçant, sourire complice et satisfait lorsque surgissait dans le flot de sa parole une idée audacieuse, une comparaison inattendue mais lumineuse. Avant de le croiser à la radio ou sur des plateaux de télé, Serge Bouchard a été pour moi une voix, le soir, quand je faisais la vaisselle. Les dimanches, je ratais rarement ses Chemins de travers. Un homme de médias, un pédagogue aussi,
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Visite paroissiale en Cessna : Jimmy Delalin, prêtre et aventurier
Vaste Côte-Nord. Imaginez un gigantesque territoire d’une superficie de 236 502 km2 bordé par 1300 kilomètres de côte et parsemé par un nombre incroyable de lacs, de forêts et de plaines. Dans cette gigantesque étendue, des villes et des villages donnent havre à 92 712 âmes, dont des Inuits et des autochtones qui occupent cette immense région depuis des millénaires. C’est là qu’en 2007 Jimmy Delalin, missionnaire, a accepté de s’établir et d’exercer son ministère. Français d’origine, l’homme de 54 ans est né dans la région des Hauts-de-France (Nord-Pas-de-Calais). C’est le pays des « Ch’timi » popularisé par la comédie Bienvenue chez les Ch’tis. « Quand vous habitez un diocèse de 500 prêtres
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Un transport en communion
« Pouiches » C’est le terme qu’a utilisé Catherine Dorion pour qualifier les idées de la CAQ en matière de transports collectifs. Un caractère « pouiche » qui s’explique notamment par le fait que la ministre responsable de la Capitale-Nationale ne prendrait vraisemblablement jamais le bus. J’aime prendre régulièrement le transport en commun. Donc, suivant ce raisonnement, j’ai bon espoir de me prémunir contre le risque de développer des idées « pouiches » à ce sujet. Me voilà rassurée ! J’aime ça au point où ça peut sembler intrigant. Ça me plait même quand un parcours s’éternise. C’est même à se demander si je ne suis pas
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Nicole Lapierre : « Nous sommes tous des spécimens de la commune humanité »
Nicole Lapierre est sociologue, anthropologue et directrice émérite au Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Issue d’une famille juive polonaise installée en France pour fuir le nazisme au tournant de la Deuxième Guerre mondiale, sa carrière a été marquée par une réflexion approfondie sur les questions de la mémoire, de la transmission et de l’identité. Un de ses livres, Sauve qui peut la vie, a remporté le prix Médicis essai en 2015. Dans une entrevue intimiste, cette grande amie d’Edgar Morin nous fait visiter une partie de son œuvre à travers des thèmes qui lui tiennent à cœur. Une véritable
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Éduquer aux médias : pas que pour les enfants
Un texte de Florence Jacolin « La faillite des médias ». Rien de moins. Voilà le titre donné au baromètre de confiance Edleman 2021 sur la confiance aux institutions. En 2021, 55 % des Canadiens font confiance aux médias traditionnels ; l’année précédente, c’était 65 %. Que s’est-il passé ? Il se peut que le traitement médiatique de la COVID-19 ait été lourdement sanctionné, mais notre méconnaissance du fonctionnement des médias, qu’ils soient traditionnels ou sociaux, n’y sont pas pour rien. L’ignorance engendre la peur de l’inconnu. L’éducation aux médias a ici un rôle majeur à jouer pour tous. Médias, informations et communication D’après l’UNESCO l’éducation aux médias
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Deux missionnaires africains sur la Côte-Nord
Sur l’écran de mon ordinateur apparait le visage souriant du père Gérard Tsatselam, originaire du Cameroun. Il est missionnaire dans une contrée toute blanche nimbée de mystères et traversée par des légendes issues du fond des âges : la Côte-Nord. Le père Gérard n’est pas seul à parcourir ce très vaste territoire. D’autres hommes d’Église venus du même continent ont laissé derrière eux familles et amis pour la même mission. Parmi eux, le père Nnaemeka Cornelius Ali, né au Nigeria. Le Verbe a fait leur connaissance afin d’en apprendre un peu plus sur la rencontre improbable entre des ecclésiastiques africains et le peuple innu.
