Nos articles

Magazine
Page précédente
  • Les corps intermédiaires

    Ce sera notre petit secret. Il m’arrive parfois, à la manière des gens qui se projettent dans d’inaccessibles fantasmes pornographiques, de regarder des philosophes débattre sur YouTube. L’autre jour, l’un d’eux rappelait que, pour la philosophe Hannah Arendt, l’État totalitaire avance en taille et en vigueur au fur et à mesure que les corps intermédiaires s’éclipsent. (Non, un corps intermédiaire n’est pas l’oreiller que votre épouse place entre elle et vous, tel un infranchissable récif corallien, pour éviter que vos pieds froids atteignent ses mollets sous la couette.) Les corps intermédiaires sont ces groupements humains – la famille, l’association du

  • touristestouristes

    Pèlerins et touristes : une cohabitation nécessaire

    Pendant que les paroisses sont désertées et les églises démolies, les grands sanctuaires du Québec sont investis par des masses de touristes en quête de beauté et d’authenticité. Chaque année, c’est en moyenne quatre-millions de visiteurs qui se relaient dans ces lieux souvent boudés par les locaux. Tendance lourde dans l’industrie, le tourisme religieux est appelé à croitre. Pour les responsables d’Église, cet afflux représente autant un défi qu’une occasion favorable. Claude Grou a été recteur de l’Oratoire Saint-Joseph du mont Royal pendant quinze ans. On visite pour différentes raisons ce sanctuaire qui abrite le tombeau de saint frère André :

  • Le solitaire sociable

    Vous en aurez peut-être rencontré un durant le dernier confinement : un érudit qui se vante de son amour de la solitude et se lamente de l’incapacité des « petites gens » à faire comme lui. Le même qui se plait à citer Blaise Pascal, affectant toujours bien sûr un petit air de dépit : « J’ai dit souvent que tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre. » Certains ont même profité du long confinement pour soutenir que l’homme véritablement accompli n’est pas par nature sociable.  L’ennui et non la nature, a-t-on écrit durant

  • J’ai déjà été apostat (juste une fois au chalet)

    « Il n’y a même pas cent personnes dans ce pays qui haïssent l’Église catholique. Mais il y en a des millions qui haïssent ce qu’ils pensent à tort être l’Église catholique » – Fulton Sheen L’apostasie fait de nouveau la manchette au Québec. Fidèle à son cycle d’à peu près trois ans, elle refait surface chaque fois qu’un scandale ou une polémique concernant l’Église catholique vient alimenter la machine médiatique. Ces jours-ci, c’est en raison des pensionnats autochtones.  Je pense que c’est on ne peut plus légitime que des personnes veuillent contester leur appartenance à une institution à laquelle ils n’adhèrent pas ou

  • universunivers

    Ces milliardaires qui veulent monter au ciel

    Dimanche dernier, à 71 ans, le milliardaire Richard Branson a fait un vol touristique d’une quinzaine de minutes dans l’espace. Plusieurs admirateurs y voient le signe d’une « nouvelle ère spatiale ». Le fondateur de Virgin n’est pas seul dans cette course et industrie galactique. Le président d’Amazon, Jeff Bezos, doit lui aussi s’envoler le 20 juillet avec son propre engin créé par sa société Blue Origin. Le père de PayPal et Tesla, Elon Musk, a pour sa part prévu de décoller avec sa compagnie Space X en septembre prochain. Ce sont des centaines de vols par année que ces trois compagnies souhaitent offrir sous peu…

  • Serge Bouchard : une voix, le soir

    Une voix impossible à oublier. Grave, chaude, juste. Servie par un propos cohérent, structuré, clair ; des réflexions simples mais riches, imagées. Un personnage aussi dont il savait jouer : chapeau à la Indiana Jones, barbe blanche, œil perçant, sourire complice et satisfait lorsque surgissait dans le flot de sa parole une idée audacieuse, une comparaison inattendue mais lumineuse. Avant de le croiser à la radio ou sur des plateaux de télé, Serge Bouchard a été pour moi une voix, le soir, quand je faisais la vaisselle. Les dimanches, je ratais rarement ses Chemins de travers. Un homme de médias, un pédagogue aussi,

  • Visite paroissiale en Cessna : Jimmy Delalin, prêtre et aventurier

    Vaste Côte-Nord. Imaginez un gigantesque territoire d’une superficie de 236 502 km2 bordé par 1300 kilomètres de côte et parsemé par un nombre incroyable de lacs, de forêts et de plaines. Dans cette gigantesque étendue, des villes et des villages donnent havre à 92 712 âmes, dont des Inuits et des autochtones qui occupent cette immense région depuis des millénaires. C’est là qu’en 2007 Jimmy Delalin, missionnaire, a accepté de s’établir et d’exercer son ministère. Français d’origine, l’homme de 54 ans est né dans la région des Hauts-de-France (Nord-Pas-de-Calais). C’est le pays des « Ch’timi » popularisé par la comédie Bienvenue chez les Ch’tis. « Quand vous habitez un diocèse de 500 prêtres

  • Un transport en communion

    « Pouiches » C’est le terme qu’a utilisé Catherine Dorion pour qualifier les idées de la CAQ en matière de transports collectifs. Un caractère « pouiche » qui s’explique notamment par le fait que la ministre responsable de la Capitale-Nationale ne prendrait vraisemblablement jamais le bus. J’aime prendre régulièrement le transport en commun. Donc, suivant ce raisonnement, j’ai bon espoir de me prémunir contre le risque de développer des idées « pouiches » à ce sujet. Me voilà rassurée ! J’aime ça au point où ça peut sembler intrigant. Ça me plait même quand un parcours s’éternise. C’est même à se demander si je ne suis pas

  • Nicole LapierreNicole Lapierre

    Nicole Lapierre : « Nous sommes tous des spécimens de la commune humanité »

    Nicole Lapierre est sociologue, anthropologue et directrice émérite au Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Issue d’une famille juive polonaise installée en France pour fuir le nazisme au tournant de la Deuxième Guerre mondiale, sa carrière a été marquée par une réflexion approfondie sur les questions de la mémoire, de la transmission et de l’identité. Un de ses livres, Sauve qui peut la vie, a remporté le prix Médicis essai en 2015. Dans une entrevue intimiste, cette grande amie d’Edgar Morin nous fait visiter une partie de son œuvre à travers des thèmes qui lui tiennent à cœur. Une véritable

  • médiasmédias

    Éduquer aux médias : pas que pour les enfants

    Un texte de Florence Jacolin « La faillite des médias ». Rien de moins. Voilà le titre donné au baromètre de confiance Edleman 2021 sur la confiance aux institutions. En 2021, 55 % des Canadiens font confiance aux médias traditionnels ; l’année précédente, c’était 65 %. Que s’est-il passé ? Il se peut que le traitement médiatique de la COVID-19 ait été lourdement sanctionné, mais notre méconnaissance du fonctionnement des médias, qu’ils soient traditionnels ou sociaux, n’y sont pas pour rien. L’ignorance engendre la peur de l’inconnu. L’éducation aux médias a ici un rôle majeur à jouer pour tous. Médias, informations et communication D’après l’UNESCO l’éducation aux médias

  • Deux missionnaires africains sur la Côte-Nord

    Sur l’écran de mon ordinateur apparait le visage souriant du père Gérard Tsatselam, originaire du Cameroun. Il est missionnaire dans une contrée toute blanche nimbée de mystères et traversée par des légendes issues du fond des âges : la Côte-Nord. Le père Gérard n’est pas seul à parcourir ce très vaste territoire. D’autres hommes d’Église venus du même continent ont laissé derrière eux familles et amis pour la même mission. Parmi eux, le père Nnaemeka Cornelius Ali, né au Nigeria. Le Verbe a fait leur connaissance afin d’en apprendre un peu plus sur la rencontre improbable entre des ecclésiastiques africains et le peuple innu.

  • The ChosenThe Chosen

    The Chosen, une série catholiquement correcte

    *** AVERTISSEMENT : Cet article comporte une pléthore de divulgâcheurs. *** Je l’admets, j’ai levé le nez sur la série chrétienne The Chosen pendant plus d’un an. Et maintenant, je l’avoue, je suis accro et je #bingeJesus régulièrement. Je croyais que ce serait une petite série proprette avec une belle morale chrétienne, mais non. La distribution est incroyable, les acteurs excellents. Jésus (Jonathan Roumi) est crédible, attachant, profond : il rit, il danse, il fait des blagues, il est imprévisible et ne dit jamais de quoi demain sera fait (un running gag dans la série), il rappelle à l’ordre ses disciples surprotecteurs et orgueilleux qui ne

  • Je suis nostalgique de nos vieilles amours

    Mon mari dit que je suis nostalgique de nos vieux jours. Faut comprendre que c’est un poète, mon mari.  Il dit ça parce que je deviens émue chaque fois que je vois un couple de vieux amoureux qui prennent leur marche en se tenant la main, que j’ai systématiquement le cœur lourd de penser qu’on ne vivrait peut-être pas ensemble aussi longtemps… Voilà.  C’est pour ça qu’il dit ça.  Chaque fois, c’est immanquable, je prends une voix aigüe, la même que lorsque je parle à mes bébés, et je lui dis : « Check! Ça, c’est toi pis moi, dans 50 ans ! »

  • Jesse Mac CormackJesse Mac Cormack

    Jesse Mac Cormack : apprendre à donner

    Jesse Mac Cormack est de ces musiciens qui prennent leur temps. Même s’il a lancé son premier EP Music for the Soul en 2014, il aura fallu attendre six ans pour Now, son premier disque de longue durée. Il a su se faire connaitre entretemps et attiser le désir des mélomanes avec Crush (2015) et After the Glow (2016), tous deux sous l’excellente étiquette montréalaise de Secret City Records (Patrick Watson, Alexandra Stréliski). C’est également à titre de réalisateur que Jesse Mac Cormack collabore à plusieurs albums, dont Le silence des troupeaux, le plus récent de Philippe Brach. Il a généreusement accepté de se confier au Verbe dans cette période de déconfinement. Qu’est-ce qui

  • Denise SioufiDenise Sioufi

    De la Syrie au Canada : l’appel de Dieu à l’étranger

    Lorsqu’elle est partie, en 2012, Denise Sioufi ne savait pas qu’elle ne reverrait pas la Syrie. Bagages pour deux semaines en main, sa famille et elle pensaient revenir après le mariage auquel ils étaient invités au Liban. Mais comme beaucoup d’autres Syriens, la guerre ne leur a pas laissé le choix. Portrait d’une jeune syrienne dont la foi a su persister au-delà des frontières. À l’âge de 12 ans, Denise se reconstruit donc une vie au Liban. Quatre ans plus tard, alors qu’elle commence à s’y sentir chez elle, la demande d’immigration au Canada de ses parents est acceptée. Si

  • Blanche LamontagneBlanche Lamontagne

    Blanche en terrasse, Lamontagne en terroir

    Voilà la chaleur de l’été qui s’installe. Quelle joie de pouvoir à nouveau profiter des terrasses récemment « déconfinées » ou simplement de nos balcons. J’étais justement en train de bénéficier du soleil dans ma cour arrière lorsque j’ai eu l’idée de cette chronique. Quelqu’un qui connait bien mes affinités avec la poésie québécoise venait de m’offrir une bière aux accents de pamplemousse, la Blanche Lamontagne. Je me suis alors demandé qui, parmi les amateurs de bière, connait l’identité de Blanche Lamontagne? Je vous propose ici de la découvrir. Sur l’étiquette de cette bière brassée par la microbrasserie gaspésienne Pit Caribou, on peut lire :

  • MassicotteMassicotte

    Edmond J. Massicotte, illustrateur de l’âme d’un peuple

    Edmond-Joseph Massicotte (1875-1929) est un artiste-illustrateur de grand talent: il a su représenter avec brio les racines profondes du Québec traditionnel.  La façon la plus simple de découvrir l’œuvre de ce Montréalais d’origine est d’ouvrir le livre Nos Canadiens d’autrefois, publié en 1923. Cet ouvrage est une synthèse de l’œuvre de Massicotte qui illustre les traditions populaires des Canadiens français. Chacune des douze illustrations composant le recueil est commentée par un auteur contemporain de la publication, dont Lionel Groulx, Marius Barbeau et le frère Marie-Victorin.  Tous ces personnages influents appartiennent à la mouvance du régionalisme canadien-français. Les élites sociales de l’époque,

  • Dérives libertaires

    À 14 ans, Camille Kouchner apprend que son frère jumeau est agressé sexuellement par leur beau-père, un professeur d’université très en vue dans les beaux milieux parisiens. Son frère souffre, mais il refuse de parler et demande à sa sœur de garder ce lourd secret. La familia grande (Seuil, 2021) ne raconte pas seulement l’histoire glauque d’un inceste et l’éclatement d’une famille, il décrit les valeurs troubles d’une « gauche caviar » – ce sont les mots de l’auteure. Un portrait à charge, certes, qui n’a cependant rien d’un pamphlet idéologique. Avec beaucoup de sensibilité, elle montre le versant sombre d’une pensée libertaire très

  • survivancesurvivance

    La grande victoire de notre survivance

    Les Américains ont leur Guerre d’indépendance, les Français leur révolution (ou le baptême de Clovis, si vous préférez), mais nous, les Québécois, quelle histoire avons-nous à nous raconter pour nous rendre fiers de nos origines et nous donner le gout d’aller vers notre pleine maturité? Des récits qui laissent perplexes Je suis navré de voir comment certains nationalistes, à la recherche de ce mythe fondateur, font des choix qui laissent perplexes. Un mythe fondateur, ou «récit national», est un évènement ou une lecture de l’Histoire susceptible de rassembler et de mobiliser un peuple. Or, on propose souvent par exemple la

  • universunivers

    Crise de la santé ou de la vérité ?

    Je faisais mon bilan de la dernière année l’autre jour. Et puis ça m’a sauté au visage : je ne connais aucun mort, ni même aucun grand malade de la covid. Non pas qu’elle n’existe pas ! Mais dans mon cas, je n’ai pas été touché personnellement par cette crise médicale, ni dans mon corps, ni dans celui de ceux que j’aime. Pour moi, comme pour beaucoup d’autres, j’ai surtout vécu la crise par le biais des mesures et des médias. J’en déduis que, pour une bonne part d’entre nous qui ne travaillons pas dans le système de la santé,

  • Jeanne ManceJeanne Mance

    Jeanne Mance : mystique, infirmière et… gestionnaire

    Le 29 avril 2021, la vénérable Jeanne Mance a été intronisée au Temple de la renommée médicale canadienne. La réputation de Jeanne Mance comme fondatrice de Montréal n’est plus à faire, mais cette reconnaissance souligne l’apport indéniable de cette femme laïque à la médecine de son époque. Dans l’Église catholique, Jeanne Mance est surtout connue comme une des figures fondatrices de l’Église du Canada. L’histoire générale retiendra également d’elle qu’elle fut une des pionnières de la Nouvelle-France. Quant aux Montréalais, ils voient dans la figure de Jeanne Mance, avec Paul Chomedey de Maisonneuve, la fondatrice de leur ville. Qu’une femme

  • #MeToo, le mariage et Dieu

    Lui ne m’a pas reconnu. Ça se comprend : c’était il y a 14 ans déjà. Comment me reconnaitrait-il à travers les allées du Métro, les charriots et les masques ? Sans compter ma poussette… Il ne sait probablement pas que j’ai maintenant un fils ! Je le trouvais beau. Je venais d’avoir 15 ans, c’était un gros party et j’avais pas mal trop bu (pour me donner le courage de lui parler).  J’ai été tellement malade !   J’avais la tête qui tournait, les idées confuses. Et je me suis retrouvée avec lui.  Je n’étais pas vraiment contre. Je l’aimais bien et j’espérais qu’il

  • marcmarc

    Marc Tousignant: un père presque parfait

    De l’extérieur, certaines histoires paraissent idylliques. Curieuse, je suis allée voir un père de famille « parfaite » pour mieux comprendre c’est quoi le truc. Regard sur la paternité assumée d’un homme qui a décidé de bâtir sa maison sur le roc.  Marc est papa sept fois. Le matin, il se lève avant tout le monde pour s’assurer d’une douche bien chaude. Ensuite, il prend un temps, iPod en tête, en compagnie du Tout-Autre. Après, il descend à la cuisine pour faire le lunch de sa grande fille. Ce matin, il a fait son fromage. Entre deux brassées ? Pratique d’accordéon. Je lui

  • La sècheresse

    Dans l’univers niché des sciences de l’espace (espace comme dans « ça prend de la place » et pas comme dans « la lune et les étoiles »), on trouve une branche dédiée à la diagonalité. C’est-à-dire l’étude des choses placées à angle par rapport à la perpendiculaire. Les livres dans une bibliothèque, les oranges dans un présentoir, etc. Cette science théorique trouve son application dans plusieurs idées pratiques, comme les stationnements à angle, là où les rues sont trop étroites. Ce modèle s’est multiplié, au point où l’on sait maintenant qu’une voiture obliquée prend moins d’espace que la même voiture perpendiculaire, le nez

Page suivante

Aidez-nous avec un don

Le Verbe, un média 100 % gratuit

Je veux donner