
À la recherche du sens perdu
À l’occasion du dévoilement des résultats de l’enquête du Verbe sur les chercheurs de sens, je m’interroge sur le sens, justement, de ce concept. Qu’est-ce qui est tant recherché? De quoi manquons-nous?
Pour mieux comprendre le sens des mots, je m’en remets toujours à mon bon vieux dictionnaire, Le Petit Robert de 1983. Cette édition vise juste, presque à tout coup.
*
Retenons d’abord cette définition: «idée intelligible à laquelle un objet de pensée peut être rapporté et qui sert à l’expliquer, à justifier son existence». C’est à cet aspect que réfère, par exemple, l’expression «le sens de la vie». La vie, quand même, est un objet de pensée qui nous préoccupe d’une façon toute particulière. Surtout notre vie.
La question de savoir s’il nous revient de créer ce sens, ou plutôt de le découvrir, reste ouverte, mais il est évident que certaines choses donnent du sens. On peut penser au travail qui permet d’actualiser le potentiel qui nous est propre, aux êtres chers qui nous aiment et que nous aimons ou aux buts et projets qui nous motivent.
Dans ses travaux, le psychothérapeute Viktor Frankl montre d’ailleurs qu’il est essentiel pour un individu de percevoir le sens de sa vie. C’est, littéralement, une question de survie. Son expérience des camps de concentration est à l’origine de sa démarche. Il a observé qu’une personne avait plus de chances d’en sortir s’il avait une raison de vivre.
*
Une autre acception du terme concerne l’idée de chercher ce qu’une chose veut dire, ce que nous faisons ici. Le sens des mots, bien sûr, mais plus généralement le sens de n’importe quel signe, qu’il soit visuel, sonore, olfactif ou tactile. Nous percevons et entendons quelque chose, et notre intelligence se dirige vers autre chose. Cette dimension de la notion de sens recoupe parfois la première. Il est ainsi possible de voir les évènements qui jalonnent une vie comme des signes avec un sens particulier.
Nous avons besoin de percevoir une certaine trame cohérente en filigrane des évènements que nous vivons et des décisions que nous prenons. Il faut ainsi les interpréter, comme pour les mots, pour en trouver la signification.
*
En poursuivant l’exploration du mot «sens», nous trouvons également l’idée de direction. Ne disons-nous pas d’une flèche ou d’une aiguille qui pointe une direction qu’elle va dans un certain sens? Cette image renvoie, encore une fois, à notre première définition. En effet, nous pouvons aussi dire que nous cherchons à donner une direction à notre vie, à répondre à la question «où vais-je?».
Mais pour savoir quelle direction prendre, encore faut-il un but. Nous retrouvons ici l’idée de projet évoqué plus haut dans les choses qui donnent du sens. L’objectif fixé oriente nos actions, leur donne un sens. Nous savons pour quoi nous faisons les choses.
*
Dans tous les cas, nous avons soif de cette chose si difficile à cerner. Nous la devinons, nous sentons qu’elle existe et nous pouvons passer une vie entière à la chercher. Cette quête est universelle et de toutes les époques.
Toutes les définitions ne répondent toutefois pas à cette question fondamentale: le sens est-il créé ou perçu? Est-il à faire ou à accueillir? Si c’est notre responsabilité, la tâche peut sembler pour le moins angoissante. Et s’il n’y en avait pas, si la recherche s’avérait vaine? Avec Camus, nous serions alors confrontés à l’absurde. Il peut être difficile de vivre avec ce sentiment. Il y a une grande part de mystère.
Peut-être que l’essentiel, même si nous n’arrivons pas toujours à le percevoir ou même à le définir, c’est de garder confiance. Il est là, quelque part. La vie a un sens, et il se laisse trouver.
Ce contenu n'a pas été chargé automatiquement puisqu'il provient d'un fournisseur externe qui pourrait ne pas respecter vos préférences en matière de témoins.