
Sept paroles du pape François qui passeront à l’histoire
Durant ses 12 ans de pontificat, le pape François s’est donné sans compter jusqu’à l’extrême. En plus de tous ses voyages et audiences, il a rédigé quatre encycliques et sept exhortations apostoliques, publié 73 motu proprio et 24 constitutions apostoliques. Il a prononcé plusieurs centaines d’homélies et de discours, dont parfois plus de trois par jours! Il y a peu de journées où il n’a pas pris la parole pour transmettre la foi, défendre les plus faibles ou corriger les puissants. Son habitude de déroger du texte préparé pour se laisser aller à des improvisations parsemées d’humour, d’anecdotes et de formules-chocs est célèbre. En mémoire de ce pape souvent surprenant et décapant, voici sept paroles qui passeront sans doute à l’histoire.
1. «Priez pour moi»
Les toutes premières paroles du Pape François, prononcées du haut du balcon donnant sur la place Saint-Pierre, donnent le ton à son pontificat. À l’image de saint François d’Assise, dont il a choisi le nom, le Saint-Père se présente ainsi au monde comme un homme simple qui désire suivre le Christ sur un chemin d’humilité.
Et maintenant je voudrais donner la bénédiction, mais auparavant, auparavant, je vous demande une faveur: avant que l’Évêque bénisse le peuple, je vous demande de prier le Seigneur afin qu’Il me bénisse: la prière du peuple, demandant la Bénédiction pour son Évêque. […] Grand merci pour votre accueil. Priez pour moi et à bientôt! – Première apparition du pape François au balcon de la basilique Saint-Pierre
- Photo : Riccardo De Luca/Alamy Stock Photo/Le Verbe
2. «Ah, comme je voudrais une Église pauvre et pour les pauvres!»
Trois jours après avoir été élu 266e pape de l’Église catholique, François rencontre les représentants des médias et leur raconte l’anecdote qui l’a conduit à choisir le nom de François. La pauvreté, aussi bien matérielle que spirituelle, est probablement le mot qui résume au mieux les priorités et le style de son pontificat.
À l’élection, j’avais à côté de moi l’Archevêque émérite de Sao Paulo et aussi le Préfet émérite de la Congrégation pour le Clergé, le Cardinal Claudio Hummes: un grand ami, un grand ami! Quand la chose devenait un peu dangereuse, lui me réconfortait. Et quand les votes sont montés aux deux tiers, l’applaudissement habituel a eu lieu, parce que le Pape a été élu. Et lui m’a serré dans ses bras, il m’a embrassé et m’a dit: “N’oublie pas les pauvres!” Et cette parole est entrée en moi: les pauvres, les pauvres. Ensuite, aussitôt, en relation aux pauvres, j’ai pensé à François d’Assise. Ensuite, j’ai pensé aux guerres, alors que le scrutin se poursuivait, jusqu’à la fin des votes. Et François est l’homme de la paix. Et ainsi est venu le nom, dans mon cœur: François d’Assise. C’est pour moi l’homme de la pauvreté, l’homme de la paix, l’homme qui aime et préserve la création; en ce moment, nous avons aussi avec la création une relation qui n’est pas très bonne, non? C’est l’homme qui nous donne cet esprit de paix, l’homme pauvre… Ah, comme je voudrais une Église pauvre et pour les pauvres! – Rencontre avec les représentants des médias
3. «Ne vous laissez pas voler l’espérance!»
Des trois vertus théologales (foi, espérance, charité), François a certainement beaucoup misé sur l’espérance. Dans un monde marqué par de nombreuses crises, le pape argentin multiplie les gestes et les paroles d’espérance. Il rappelle par là l’essentiel du mystère chrétien: «L’espérance ne déçoit pas, puisque l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit saint qui nous a été donné.» (Rm 5:5) Son pontificat se conclut d’ailleurs sur le Jubilé 2025, placé sous le thème «Pèlerins d’espérance».
Ne soyez jamais des hommes et des femmes tristes: un chrétien ne peut jamais l’être! Ne vous laissez jamais prendre par le découragement! Notre joie n’est pas une joie qui nait du fait de posséder de nombreuses choses, mais elle nait du fait d’avoir rencontré une Personne: Jésus, qui est parmi nous; elle nait du fait de savoir qu’avec lui nous ne sommes jamais seuls, même dans les moments difficiles, même quand le chemin de la vie se heurte à des problèmes et à des obstacles qui semblent insurmontables, et il y en a tant! Et à ce moment-là vient l’ennemi, vient le diable, si souvent déguisé en ange, et insidieusement nous dit sa parole. Ne l’écoutez pas! Suivons Jésus! Nous accompagnons, nous suivons Jésus, mais surtout nous savons que lui nous accompagne et nous met sur ses épaules: ici se trouve notre joie, l’espérance que nous devons porter dans notre monde. Et s’il vous plait! Ne vous laissez pas voler l’espérance! Ne vous laissez pas voler l’espérance! Celle que Jésus nous donne. – Homélie du dimanche des Rameaux
- Photo : Wikimedia Commons/Le Verbe
4. «Le Seigneur ne se lasse jamais de pardonner: jamais! C’est nous qui nous fatiguons de lui demander pardon.»
Lors d’une homélie de carême à l’église paroissiale des citoyens et employés du Vatican, le pape François montre ses qualités de bon curé de campagne. Il raconte une bonne histoire et trouve les bonnes formules pour faire passer son message: Dieu pardonne «jusqu’à soixante-dix fois sept fois» (Mt 18:22), sa miséricorde est infinie! Son pontificat se déroule entièrement sous le signe de la miséricorde. Le Jubilé de la Miséricorde, en 2016, et sa devise épiscopale, Miserando atque eligendo (En le regardant avec miséricorde, il le choisit), en témoignent.
Il n’est pas facile de se confier à la miséricorde de Dieu, parce qu’elle est un abime incompréhensible. Mais nous devons le faire! “Oh, père, si vous connaissiez ma vie, vous ne me parleriez pas ainsi! […] Oh, j’en ai fait de grosses!” Va chez Jésus: il aime que tu lui racontes ces choses ! Lui, il oublie! Il a, lui, une capacité d’oublier spéciale. Il oublie, il t’embrasse, te prend dans ses bras et te dit seulement: “Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus” (Jn 8:11). Il te donne seulement ce conseil. Un mois après, nous sommes dans les mêmes conditions… Retournons vers le Seigneur. Le Seigneur ne se fatigue jamais de pardonner: jamais! C’est nous qui nous fatiguons de lui demander pardon. Et demandons la grâce de ne pas nous fatiguer de demander pardon, parce que lui ne se fatigue jamais de pardonner. Demandons cette grâce! – Homélie à l’église Sainte-Anne
5. «Qui suis-je pour juger?»
Dans le vol de retour après les Journées mondiales de la Jeunesse, au Brésil, un journaliste interroge le pape sur un prétendu lobby gai, au Vatican. Sa réponse reprend les paroles du Christ en Matthieu (7:1): «Ne jugez pas, pour ne pas être jugés; de la manière dont vous jugez, vous serez jugés». On peut également penser à saint Augustin, qui invitait à «juger le péché, non le pécheur». Souvent cités hors contexte et mal interprétés, ces mots du pape visent surtout à rappeler que Dieu seul peut juger les cœurs (1 Cor 4:5) et que «la miséricorde l’emporte sur le jugement» (Jc 2:13). Du début à la fin de son pontificat, le pape François a toujours tenté de rejoindre les personnes marginalisées.
Vous parlez du lobby gai. Bah! On écrit beaucoup sur le lobby gai. Je n’ai encore trouvé personne au Vatican qui me donne sa carte d’identité avec “gai”. On dit qu’il y en a. Je crois que lorsqu’on se trouve avec une telle personne, on doit distinguer le fait d’être “gai”, du fait de faire un lobby; parce que les lobbys, tous ne sont pas bons. Celui-ci est mauvais. Si une personne est gaie et cherche le Seigneur, fait preuve de bonne volonté, qui suis-je pour la juger? Le Catéchisme de l’Église catholique l’explique de manière très belle, il dit: “Nous ne devons pas mettre en marge ces personnes pour cela, elles doivent être intégrées dans la société”. Le problème n’est pas d’avoir cette tendance, non. […] Le problème est de faire de cette tendance, un lobby. – Conférence de presse durant le vol de retour des JMJ de Rio de Janeiro
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6. «La terre, notre maison commune, semble se transformer toujours davantage en un immense dépotoir.»
François est sans doute le pape qui a tenu les propos les plus verts de l’histoire. Avec ses deux grands textes, Laudato si' et Laudate Deum, il s’impose comme une figure majeure de la lutte contre les changements climatiques. Il développe même les notions de péché et de conversion écologique. Pour ce pape d’Amérique latine «tout est lié», et c’est pourquoi il est impossible de dissocier «le cri de la terre et le cri des pauvres». Seule une écologie intégrale, qui prend aussi en compte le développement social et spirituel de l’homme, peut renverser la «culture du déchet» qui traite les ressources et les personnes comme des objets jetables.
Des centaines de millions de tonnes de déchets sont produites chaque année, dont beaucoup ne sont pas biodégradables : des déchets domestiques et commerciaux, des déchets de démolition, des déchets cliniques, électroniques et industriels, des déchets hautement toxiques et radioactifs. La terre, notre maison commune, semble se transformer toujours davantage en un immense dépotoir. À plusieurs endroits de la planète, les personnes âgées ont la nostalgie des paysages d’autrefois, qui aujourd’hui se voient inondés d’ordures. Aussi bien les déchets industriels que les produits chimiques utilisés dans les villes et dans l’agriculture peuvent provoquer un effet de bioaccumulation dans les organismes des populations voisines, ce qui arrive même quand le taux de présence d’un élément toxique en un lieu est bas. Bien des fois, on prend des mesures seulement quand des effets irréversibles pour la santé des personnes se sont déjà produits. Ces problèmes sont intimement liés à la culture du déchet, qui affecte aussi bien les personnes exclues que les choses, vite transformées en ordures. – Lettre encyclique Laudato si
7. «Je vois l’Église comme un hôpital de campagne après une bataille.»
Le Pape François a secoué l’Église catholique de bien des manières. Il l’a exhortée, notamment, à se convertir de ses vieilles habitudes et à revoir ses priorités. Dans une entrevue avec le père jésuite Antonio Spadaro, en 2013, il compare pour la première fois l’Église à un hôpital de campagne, qui doit agir dans l’urgence pour guérir les plus souffrants. Il revient à la charge dans sa première exhortation apostolique, La joie de l’Évangile: «Je préfère une Église accidentée, blessée et sale pour être sortie dans les rues, plutôt qu’une Église malade». Avant de convertir le monde, il a cherché à convertir son Église, l’invitant à se décentrer d’elle-même pour aller à la rencontre des plus blessés.
Je vois avec clarté que la chose dont a le plus besoin l’Église aujourd’hui, c’est la capacité de soigner les blessures et de réchauffer le cœur des fidèles, la proximité, la convivialité. Je vois l’Église comme un hôpital de campagne après une bataille. Il est inutile de demander à un blessé grave s’il a du cholestérol ou si son taux de sucre est trop haut! Nous devons soigner les blessures. Ensuite, nous pourrons aborder le reste. Soigner les blessures, soigner les blessures… Il faut commencer par le bas. L’Église s’est parfois laissé enfermer dans des petites choses, de petits préceptes. Le plus important est la première annonce: “Jésus Christ t’a sauvé!”. – Entretien avec le père Antonio Spadaro pour La Civiltà Cattolica
Biens d’autres paroles resteront gravées dans les mémoires, mais ce qui marquera probablement le plus les esprits et l’histoire, ce sont ses gestes surprenants.