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Pierre qui roule n'amasse pas mousse

Depuis la mort du pape François, le 21 avril dernier, on entend beaucoup parler de pape, de papauté, de pontificat. Quelle sorte de pape a été le pape François ? Comment qualifier son pontificat ? Comment devrait-être le prochain pape ? Bref, toutes les questions sont posées, toutes les pierres sont retournées, sauf une : c’est quoi, un pape ? On dirait que ça semble évident pour tout le monde, et pourtant…

Déjà, le mot « pape » n’est pas très usuel. Spontanément, on pense à « papa ». Avec raison, parce que « pape » vient du latin « papa » qui veut dire « père » ou « patriarche ». Les Italiens d’ailleurs appellent le pape « papa ».

Dans les premiers temps du christianisme, il était commun d’appeler les évêques « papa », mais rapidement, le terme a été réservé pour parler de celui de Rome, qui a la primauté sur les autres.

L’évêque de Rome

Pourquoi Rome ? Parce que c’est là que saint Pierre, le chef des apôtres – les douze hommes choisis par Jésus pour poursuivre son œuvre sur terre –⁠, est mort et où son corps repose toujours. L’Évangile nous rapporte ce drôle de passage où Jésus change le nom de l’apôtre Simon qui, désormais, devra s’appeler Pierre. Et il ajoute que sur cette pierre, il bâtira son église. On voit ici le côté paternel de Jésus qui fait des jokes de pères plates.

Le nom de Pierre est resté, mais la traduction la plus exacte du mot que Jésus utilise en grec serait « rocher ». En d’autres mots, Jésus vient de lui dire que son nouveau nom, c’est Rocky, rien de moins. De fait, Pierre avait un petit côté belliqueux. On se rappelle que c’est lui, au moment de l’arrestation de Jésus, qui sort son épée et coupe l’oreille d’un soldat.

C’est peut-être en partie pour cette attitude que Dieu a choisi Pierre, sachant dans son omniscience que le cours de l’histoire allait faire du pape un chef d’État (il en a profité pour faire d’une pierre deux coups).

Le pape est le chef de l’Église catholique, c’est-à-dire de l’assemblée universelle de ceux qui veulent suivre le Christ. Cette assemblée, on l’appelle aussi « le corps du Christ ». Et ce corps a une dimension visible – institutionnelle – et une dimension invisible – spirituelle.

La tête du corps, c’est le Christ; et le pape incarne de manière visible cette réalité invisible.

Un pont entre deux réalités

Le pape aussi appelé « pontife », parce qu’il fait le pont entre le ciel et la terre. Jésus a dit à Pierre que tout ce qu’il lierait ou délierait sur terre serait lié ou délié dans les cieux. Le pouvoir terrestre donné à Pierre a aussi un effet dans l’invisible. Le pape, c’est donc le pont entre l’univers visible et invisible.

Un aussi grand pouvoir, une aussi grande fonction confiée à un être humain aussi fragile et, disons-le, pécheur, c’est scandaleux. Parce que même si le pape est appelé Saint-Père, ce n’est pas parce qu’il est parfait ou déjà saint. Non, c’est parce que Dieu a promis de toujours l’assister et d’œuvrer à travers lui, malgré ses faiblesses.

Croire en cette réalité, c’est d’ailleurs la pierre d’achoppement de plusieurs chrétiens – mêmes catholiques – qui ne voient dans le pape qu’un garant de l’unité, qu’une fonction symbolique ou politique, sans plus.

C’est pourtant en toute connaissance de cause que Jésus choisit Pierre.

Je reviens à ce moment où il en fait le fondement de son Église. Jésus demande à ses apôtres : « pour vous qui suis-je ? » Et Pierre de répondre : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. » (Mt 16, 15-16)

Bonne réponse ! Deux morceaux de robots pour Pierre ! Mais Jésus lui fait remarquer que ce savoir ne vient pas du pêcheur qu’il est, mais plutôt d’une inspiration du Saint-Esprit.

Scène suivante : Jésus dit qu’il doit aller à Jérusalem, être tué pour ressusciter ensuite. Et là Pierre, en bon bonhomme impulsif répond, « Dieu t’en garde, ça ne t’arrivera pas. » La réplique de Jésus est cinglante : « Passe derrière moi Satan ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. » (Mt 16, 22-23)

D’une déclaration à une autre, Pierre passe de la vérité divine qui lui est révélée à une affirmation bêtement humaine. Comment cela se peut-il ?

Encore ici, Dieu savait ce qu’il faisait en confiant son Église à des hommes. Ce n’est pas dans la mesure où ils sont saints qu’ils disent la vérité, mais bien en raison du Saint-Esprit qui les assiste.

Pierre, c’est aussi celui qui trahit Jésus trois fois même si Jésus l’a prévenu qu’il le ferait. Mais comme il a aussi enseigné de ne pas jeter la première pierre, il lui pardonne trois fois et lui demande, par trois fois aussi, d’être le berger de son troupeau.

*

En toute honnêteté, toutes les scènes les plus ridicules de l’Évangile impliquent Pierre. Si l’Église catholique dépendait des seules capacités de cet homme et de ses successeurs, elle n’aurait pas fait un siècle.

De manière ordinaire, une vie instable, changeante ou insouciante, ne permet pas la construction d’un patrimoine très solide. Il y a un proverbe pour dire cela : pierre qui roule n’amasse pas mousse.

Et pourtant, c’est sur un Pierre instable que Dieu a bâti son Église, comme il déploie sa grâce sur notre vie.

Faisons attention à la mousse quand même…

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James Langlois
James Langlois

James Langlois est diplômé en sciences de l’éducation et a aussi étudié la philosophie et la théologie. Curieux et autodidacte, chroniqueur infatigable pour les balados du Verbe médias depuis son arrivée en 2016, il se consacre aussi de plus en plus aux grands reportages pour les pages de nos magazines.