Illustration: Andre Laame

Rémi Brague et l'art de raconter

Les histoires qui dépeignent notre origine et le sens de notre vie nous fascinent immanquablement. On les raconte partout depuis des millénaires, sous diverses formes. En quoi la Bible se démarque-t-elle des autres mythes et textes religieux? Le Verbe s’est entretenu sur ce sujet avec Rémi Brague, philosophe et historien français. Professeur émérite de l’Université Panthéon-Sorbonne (Paris 1), il est l’auteur de nombreux livres et articles mêlant philosophies antique et médiévale, histoire des idées et comparaisons entre le christianisme, le judaïsme et l’islam.

Le Verbe: Un fait semble universel: tout le monde raconte des histoires, qu’il s’agisse de Platon et sa caverne, de Jésus et ses paraboles, de Saint-Exupéry et son Petit Prince, ou encore des jeunes enfants avec leurs jouets… À votre avis, pourquoi raconte-t-on?

Rémi Brague: Nous racontons des histoires parce que nous aimons cela. Mais pourquoi aimons-nous cela? Je dirais: parce que nous nous racontons nous-mêmes, parce que chacun de nous est lui-même une histoire. Nous avons besoin de rattacher les évènements de notre vie les uns aux autres comme des perles sur un fil. La mémoire ne suffit pas, tant qu’elle ne replace pas les évènements dans l’ordre. Et pour ce faire, il faut se raconter, d’abord à soi-même, silencieusement, éventuellement à d’autres. Nous savons qui nous sommes parce que nous sommes capables de raconter ce qui nous est arrivé et ce que nous avons fait. On peut dire de toute histoire que, en un sens, c’est de nous qu’elle parle. Le mutato nomine de te fabula narratur du poète latin Horace a une valeur universelle.

«Change le nom, cette fable est ton histoire.»
Dans la première de ses Satires (35 av. J.-C.), Horace dépeint des hommes avares ou dépensiers. L’un d’eux contemple cupidement son argent dans son coffre. Et le poète d’interpeler l’auditeur: «Quid rides? mutato nomine, de te fabula narratur», soit: «Tu ris? Change le nom, cette fable est ton histoire.» Il poursuit: «Sur tes sacs amassés à tout prix, tu t’endors la bouche ouverte, tu es contraint de n’y point toucher comme s’ils étaient choses sacrées et de n’en jouir que comme d’une peinture» (Horace, Satires, I, 1, 69-73).

Si j’ai bien compris votre question, ce dont je ne suis pas très sûr, je dirais que les mythes nous disent quelque chose de notre condition humaine. Mais, pour reprendre une distinction chère au romantisme allemand, ils ne procèdent pas par des allégories, mais par des symboles. Une allégorie illustre une idée que l’on peut adéquatement exposer par le langage: représenter la justice comme une femme aux yeux bandés est une façon de dire que les tribunaux ne doivent pas faire acception de personne. Un symbole contient, et retient en même temps, un sens inépuisable.

Cela vaut pour la littérature grecque. Cela dit, la littérature moderne est elle aussi riche en mythes. Les meilleurs de ses récits sont ceux qui nous font sentir qu’ils sont lourds d’un message d’une importance capitale, qui nous est adressé, mais qui nous laisse sur notre faim quant à son sens. Chez Hermann Melville, on ne peut pas ne pas sentir que son Bartleby, son Benito Cereno, son Billy Budd, son Moby Dick ont quelque chose à nous dire. Mais sur cette chose, on peut controverser à l’infini.

Je me souviens d’avoir lu un roman de Kazuo Ishiguro, non pas le célèbre Remains of the Day (Les vestiges du jour), qui a été porté à l’écran, mais The Unconsoled (L’inconsolé). Pendant les quelque 500 pages, je n’ai cessé de me dire: «Toute cette histoire de pianiste dans une ville qui lui semble familière veut me dire quelque chose, mais quoi au juste? Il y a un sens caché, mais lequel?» J’ai refermé le livre sans avoir trouvé aucune réponse qui pût me satisfaire, et avec le sentiment de n’avoir pas perdu mon temps, mais en même temps de m’être fait avoir…

Si les bons récits sont énigmatiques, c’est précisément parce que notre vie elle-même est une énigme. Pas seulement pour les autres, mais aussi, et même tout d’abord, pour nous.

Dans la Bible, les récits sont nombreux. D’ailleurs, elle débute par la Genèse, une suite de plusieurs récits décrivant l’origine de la création, de l’humanité et du peuple de Dieu. Que nous disent ces histoires sur notre origine et le sens de notre existence? En quoi cela diffère-t-il d’autres récits mythiques?

Il faudrait entrer ici dans une comparaison fine des mythologies des peuples qui environnaient Israël. Nous les connaissons de mieux en mieux. Pensez à la redécouverte d’Ugarit sous le tell de Ras Shamra et, plus récemment, à celle d’Ebla, moins importante pour la Bible.

Il n’est pas étonnant que la plupart des mythes soient ce que l’on appelle des «mythes d’émergence», qui racontent comment les choses en sont venues à se présenter comme elles le font à présent. Ce que nous ne réussissons pas à expliquer, et que nous ne pourrons jamais expliquer, c’est notre propre venue à l’être. Bien sûr, on nous a dit comment nous sommes nés, on peut même filmer un accouchement. Mais nous n’avons jamais assisté à notre propre naissance.

Des tablettes anciennes.
Ugarit est la capitale d’un royaume datant du IIe millénaire av. J.-C. La cité a été découverte en 1929 en Syrie au tell de Ras Shamra (un monticule résultant de l’accumulation de débris de bâtiments). Les archéologues ont notamment trouvé des tablettes d’argile portant des poèmes sur le dieu Baal, auquel l’Ancien Testament fait souvent référence. Des milliers de tablettes ont aussi été trouvées en 1975 au tell Mardikh, site de l’antique ville d’Ebla (IIIe millénaire av. J.-C.). Elles contiennent principalement des données administratives.

Un détail amusant, et de plus vaste portée, concerne l’origine même de l’univers physique, de la vie et des espèces vivantes, dont la nôtre: nous avons remplacé les mythes – que se racontent les peuples que nous appelons «primitifs» – par des récits qui s’appuient sur des données venues des sciences (astrophysique, paléontologie, etc.).

Plusieurs symboles de la Genèse semblent provenir de mythologies mésopotamiennes antérieures, tels que l’Arbre de vie, le serpent, et l’idée même du jardin d’Éden. N’est-ce pas contradictoire de croire que les textes bibliques sont inspirés par Dieu, s’ils intègrent des éléments païens?

Les récits bibliques intègrent en effet des éléments venus de mythes «païens». Mais ce n’est jamais pour les reprendre tels quels; c’est au contraire toujours pour prendre une position critique par rapport à eux. Ainsi, le mot mystérieux tehom, qui désigne ce au-dessus de quoi plane le souffle de Dieu (Gn 1,2), est, peut-on penser, un écho de Tiamat, le poisson géant que le dieu babylonien Mardouk coupe en deux pour en faire le ciel et la terre. Dans la Bible, en revanche, la création n’est pas un processus violent de ce genre: tout se fait par la parole, et les choses viennent à l’être sans effort de la part du créateur. Par ailleurs, l’homme n’est pas créé pour faire le «sale boulot» alors que les dieux se prélassent, contrairement à certains mythes du Moyen-Orient selon lesquels les hommes seraient comme les esclaves des dieux.

«Le christianisme ne s’intéresse pas à lui-même, mais à l’homme auquel il s’agit de proposer le salut. Tout ce qui permet de mieux le connaitre est donc utile.»

On pourrait croire qu’il est inutile pour les chrétiens de s’intéresser à des histoires ou à des idées provenant de civilisations païennes. Pourtant, l’étude de divers textes anciens a été encouragée par l’Église au fil des siècles, qu’il s’agisse de poésie, de textes philosophiques ou de récits fondateurs mythiques. Pourquoi?

Tout d’abord, l’Église a fait beaucoup plus qu’encourager l’étude des textes anciens. Elle a commencé par rendre leur étude possible en les sauvegardant. Avant Gutenberg, il ne suffisait pas de tirer les œuvres de la poussière, il fallait les recopier, faute de quoi les textes se perdaient – ce qui arriva à une bonne partie de l’héritage littéraire du monde antique. Recopier, ce fut l’activité des moines, parfois de façon très intentionnelle. Ainsi, vers 555, Cassiodore, un patricien romain, fonda en Calabre, dans le sud de l’Italie, le couvent de Vivarium, dont la copie manuscrite était la fonction officielle. Nous devons aux scriptoria monastiques du Moyen Âge la quasi-totalité de ce que nous possédons des productions littéraires de l’Antiquité.

Maintenant, pourquoi l’Église a-t-elle agi de la sorte? Le christianisme ne s’intéresse pas à lui-même, mais à l’homme auquel il s’agit de proposer le salut. Tout ce qui permet de mieux le connaitre est donc utile.

Dans l’Ancien Testament, l’historicité de plusieurs récits semble peu probable. Est-ce pertinent pour le lecteur de distinguer ce qui est réellement arrivé de ce qui correspond plutôt à une histoire symbolique, ou à un récit dont les détails ont été amplifiés avec le temps? Cela a-t-il une influence sur notre interprétation des récits, et sur notre foi?

L’intention des auteurs qui ont rédigé les divers récits de l’Ancien Testament n’a jamais été de faire de l’histoire au sens où nous l’entendons depuis, en gros, le XIXe siècle, selon le programme bien connu de l’historien prussien Leopold von Ranke (1785-1886): raconter «ce qui s’est effectivement produit» (wie es eigentlich gewesen). Même les livres des Chroniques, qui ont l’air de tenir le registre des évènements, reposent en fait sur une grille de lecture, celle de l’auteur du Deutéronome. En gros, les choses se passent bien pour le peuple, il a de quoi manger, il l’emporte sur ses ennemis, etc., tant qu’il reste fidèle au Dieu unique d’Israël; si en revanche il l’abandonne, alors les catastrophes se succèdent sans répit.

Distinguer ce qui s’est vraiment passé est la tâche de l’historien, et c’est son devoir de la faire de la meilleure façon possible. Leurs résultats peuvent satisfaire notre curiosité désintéressée. Mais le message contenu dans les récits n’a que peu de liens avec leur valeur – comment dire? Allons, je risque le mot, même s’il a mauvaise presse – édifiante. Qu’Abraham ait réellement existé est une chose; que sa confiance sans réserve envers Dieu reste un modèle pour nous en est une autre.

Mais vous avez raison, dans votre question, de parler de l’Ancien Testament et de passer sous silence le Nouveau. Dans celui-ci, en effet, nous sommes en présence d’histoire. Le texte nous fournit des dates, des noms propres dont on connait par ailleurs les porteurs, et des détails précis que l’archéologie confirme, par exemple dans l’Évangile de saint Jean.

La Bible contient plusieurs récits violents. Seuls Noé et sa famille survivent au déluge. Dans le livre de Josué, le peuple hébreu massacre des populations lors de la conquête de Canaan. Dans une parabole de Jésus, le propriétaire de la vigne fait périr les assassins de son fils. Pourquoi cette violence dans certains récits bibliques?

La violence est un fait humain, évidemment regrettable, présent partout. Et la Bible est le miroir de l’humain en toutes ses dimensions. Mais il faut distinguer. Je l’ai fait avec plus de détail dans un livre intitulé Sur la religion (2018). Certains récits sont carrément mythiques. D’autres, qui se présentent comme historiques, racontent des évènements fictifs; c’est le cas du livre de Josué. La Bible elle-même avoue que jamais les Cananéens n’ont été exterminés, comme le montre cet exemple d’ordres inconciliables: non seulement vous les massacrerez tous, jusqu’au dernier, mais vous ne leur donnerez pas vos filles à marier (Dt 7,2-3).

Quant au Nouveau Testament, vous remarquerez que, dans la parabole des vignerons homicides, ce sont les auditeurs, scandalisés, qui répondent à la question de Jésus que le propriétaire fera tuer les assassins de son fils (Mt 21,41). C’est le gros bon sens de l’homme naturel qui parle, avec sa logique de vengeance. Le Christ, lui, a voulu mourir pour ses bourreaux…

En dehors des histoires illustrées sans texte, tout récit est véhiculé par une langue. Concernant les textes bibliques, est-il nécessaire d’apprendre les langues dans lesquelles les textes ont été écrits pour bien les comprendre? La traduction entraine-t-elle nécessairement une perte de sens?

Que la traduction entraine une perte de sens, c’est une vérité banale de le dire. «Traduttore, traditore» («traducteur, traitre»), même les gens qui ne savent que cela en italien le serinent. Cette déperdition est évidemment minime dans le cas d’un texte purement technique, tel que le mode d’emploi d’une machine ou la posologie d’un médicament. Elle est au contraire maximale pour un poème, dans lequel la sonorité des mots et leurs harmoniques sont au moins aussi importantes que leur signification. Pour la prose narrative, on est un peu entre les deux.

Quant à la Bible, bien sûr que cela ne fait pas de mal de se mettre à l’hébreu et au grec, de la même façon que pour tout texte littéraire en quelque langue que ce soit. Mais ce n’est qu’un début. Il faut aussi établir le texte, trouver la bonne leçon, comme on dit. Et, pour l’Ancien Testament, prendre en compte aussi la traduction grecque de la Septante, qui représente parfois un état du texte plus ancien que l’hébreu de la tradition (texte dit «massorétique»). Bref, on s’engage dans une quête sans fin, qu’il faudra toujours rectifier à nouveau.

L’un des noms de Jésus Christ est la Parole de Dieu. Ainsi, ce n’est pas la Bible qui est la Parole de Dieu, mais Dieu lui-même. Et il use de cette Parole pour tout créer (par exemple: «Dieu dit: “Que la lumière soit.” Et la lumière fut» dans Gn 1,3). Que faut-il principalement retenir de cette particularité du christianisme, cette Parole créatrice qui s’est incarnée en Jésus Christ?

Vous mettez le doigt sur un point capital. Le christianisme n’est pas, comme on le dit trop souvent, une «religion du livre». Certes, il y a un livre. Mais son rôle n’a rien à voir avec celui qu’il joue dans le judaïsme ou dans l’islam. Dans le christianisme, ce qui est révélé, le message de Dieu à l’homme, est une personne: Jésus de Nazareth, son enseignement, mais surtout son aventure de mort et de résurrection. Dans l’islam, ce qui est révélé est un livre, le Coran, censé avoir été dicté par Allah à Mahomet grâce à l’intermédiaire de l’ange Gabriel. Ce dernier n’aurait rien ajouté à ce qu’il transmettait, et Mahomet n’aurait rien ajouté non plus à ce qu’il recevait passivement. En revanche, pour le Juif, même le plus orthodoxe, la Bible est une œuvre humaine: la Torah a pour auteur Moïse; les Psaumes, le roi David; les livres historiques, le prophète Samuel; les écrits de sagesse, le roi Salomon. Les seules paroles qui viennent tout droit de la bouche de Dieu sont les deux premières des Dix Paroles (Exode 20). Les 611 autres commandements sont de la bouche de Moïse.

Pour revenir au christianisme, quand le prêtre, à la messe, élève solennellement le lectionnaire des Évangiles et proclame «la Parole de Dieu», ce n’est qu’une façon de parler que, personnellement, je trouve dangereuse. Ce que Dieu a dit aux hommes, c’est son Verbe, c’est son Fils, bien plus que des «paroles verbales» – comme disait dans un autre contexte je ne sais plus quel humoriste – ou un «message». Les Évangiles racontent l’histoire du Verbe incarné, ils ne sont pas le Verbe lui-même.

Il est intéressant que cette histoire comporte des traits qui se rapportent au mythe. Le grain qui meurt et ressuscite en une riche moisson (Jn 12,24-25) est au fond des cultes de la fécondité, que la Bible connaissait parfaitement, et auxquels elle fait allusion (Ps 126,5-6). L’histoire de Jésus est ce paradoxe d’un mythe vrai. Ce n’est pas au sens qu’elle contiendrait, à titre de symbole, une vérité dite «profonde», ce qu’on peut toujours dire et qui ne mange pas de pain. C’est tout simplement que ce mythe a vraiment eu lieu, dans un pays réel, qu’on peut situer sur la carte, et dans un temps qui est le même que celui de l’empereur Tibère, etc. Un libre-penseur français, Paul-Louis Couchoud (1879-1959), disait qu’il acceptait tout du Credo, sauf «sous Ponce Pilate». Et de fait, la présence du procurateur romain ancre les évènements liés à la Passion du Christ dans l’histoire la plus concrète. C’est ce paradoxe d’un évènement où l’on rencontre à la fois la richesse de sens du mythe et la solidité d’un fait bien attesté qui a emporté la conviction de C. S. Lewis, en septembre 1931, dans la célèbre conversation avec Tolkien qui l’a amené à la foi chrétienne. «Le Verbe fait chair» peut se comprendre aussi comme «le mythe devenu fait historique».

«Mais il faut distinguer le fond et la forme, car le message transmis [dans le Nouveau Testament], et avant tout les faits rapportés, aussi maladroitement que ce soit, ne peuvent pas laisser indifférents ceux qui acceptent de s’y exposer honnêtement.»

Lire la Bible n’est pas forcément une activité aussi agréable que la lecture de poésie, d’un bon roman ou de pensées profondes et élégantes. Il faut admettre qu’à part saint Paul, les auteurs du Nouveau Testament n’étaient pas de grands érudits… Pourtant, le choix des mots et des faits racontés a eu un grand retentissement ces deux derniers millénaires. Faut-il s’en étonner?

La qualité littéraire du Nouveau Testament est peut-être une question de gout… L’Ancien Testament contient des histoires tout à fait passionnantes. Rien d’étonnant à ce qu’il ait fourni aux artistes européens, à travers les siècles, une mine inépuisable de sujets pour des œuvres: tableaux, statues, épopées (je pense au Paradis perdu de John Milton), cantates, opéras, etc. Ce qui est probablement la plus belle de toutes les icônes, celle d’Andreï Roublev, représente non pas la Trinité, comme on le croit trop souvent, mais l’hospitalité d’Abraham (Gn 18,1-16).

En revanche, d’un point de vue littéraire, le Nouveau Testament ne fait pas le poids contre, avant lui, l’Iliade ou, après lui, la Commedia ou Shakespeare. Les Pères de l’Église et le Moyen Âge en étaient tout à fait conscients. Ils parlaient, à propos du Nouveau Testament, d’un «sermo piscatorius», d’une «langue de pêcheurs», par allusion au métier initial des apôtres Pierre, André, Jacques et Jean. Le Nouveau Testament ne charme pas comme un beau poème; il ne nous berce pas comme une mélopée harmonieuse; il ne nous convainc pas comme un raisonnement bien ficelé; il ne nous colle pas à notre fauteuil comme un bon roman policier. Mais il faut distinguer le fond et la forme, car le message transmis, et avant tout les faits rapportés, aussi maladroitement que ce soit, ne peuvent pas laisser indifférents ceux qui acceptent de s’y exposer honnêtement.

C’est d’ailleurs là que les Évangiles ont un point commun avec la grande littérature, qu’elle soit classique ou moderne. Après la lecture d’un bon thriller, ou d’un roman humoristique, ou encore après une séance de cinéma, nous avons passé quelques heures agréables, mais nous sommes exactement les mêmes qu’avant. En revanche, après Œdipe roi, Hamlet, Don Quichotte, Les frères Karamazov, quelque chose en nous a changé. À plus forte raison si nous lisons avec quelque attention un des quatre Évangiles.

Ariane Beauféray
Ariane Beauféray

Ariane Beauféray est doctorante en aménagement du territoire et développement régional. Elle s’intéresse à l’écologie intégrale et met au point de nouveaux outils pour aider la prise de décision dans ce domaine. Collaboratrice de la première heure, elle est désormais membre permanente de l’équipe de journalistes du Verbe médias.