Photo : Avec l'aimable collaboration de Timothy Paul Schmalz

Timothy Paul Schmalz : la sculpture au service des Écritures

Le rayonnement des statues d’impulsion biblique de l’artiste canadien Timothy Paul Schmalz ne connait pas de frontière. Dernièrement, la basilique Sainte-Anne-de-Beaupré, près de Québec, a acquis une de ses œuvres, When I was Hungry and Thirsty (Quand j’avais faim et soif). Le Verbe a rencontré l’artiste de renommée internationale pour lever le voile sur une démarche unique et inspirée.

Étonnamment, c’est l’artiste lui-même qui a directement proposé au curé Jacques Fortin sur la côte de Beaupré d’exposer la statue, bénie le 30 juin 2024 devant la basilique. Financée par un généreux bienfaiteur, cette création s’ajoute à la centaine déjà installées dans le monde entier. Schmalz rêve d’en voir une dans chaque grande ville.

Cette statue, issue d’une série inspirée du chapitre 25 de l’Évangile de Matthieu, reflète le message du Christ : le reconnaitre en chaque personne, surtout les plus souffrantes. Le verset 40 du chapitre y est d’ailleurs gravé : « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits qui sont les miens, c’est à moi que vous l’avez fait ».

On prévoyait l’installation de l’œuvre à l’intérieur de la basilique, mais le sculpteur a refusé, car « les pauvres ne sont pas à l’intérieur, mais bien à l’extérieur ».

Le réalisme est tel que les passants la prennent d’abord pour un vrai mendiant qui leur tend la main. Ce n’est qu’en s’approchant qu’ils s’aperçoivent que la main est « marquée du trou de la passion », et que le visage représente la face du Christ. « Ce sont souvent les enfants, qui sont à sa hauteur, qui le disent aux parents », explique le père Fortin.

Jésus représenté comme il l’aurait souhaité

En entretien avec Le Verbe, Tim Schmalz se confie sur sa démarche. Il s’est demandé ce que Jésus aurait voulu comme représentation. Sa réponse est dans son œuvre : « Comme il se représentait lui-même », de la façon « la plus humble possible ». L’artiste préfère de telles représentations de Jésus à celles, plus classiques, qui le montrent comme un roi dans toute sa grande perfection. Selon lui, on est plus proche de la vérité de l’Évangile quand on dépeint le Christ dans sa plus profonde vulnérabilité.

Une autre statue, Homeless Jesus (Jésus sans-abri), représente un homme couché sur un banc, couvert d’un drap des pieds à la tête. Seules les marques de la crucifixion au creux de ses mains laissent deviner qu’il s’agit de Jésus. Les deux premières églises à qui l’artiste l’a offerte ont décliné, expliquant que son art ne faisait pas l’unanimité. Une femme a déjà appelé la police pour qu’on vienne chercher ce qu’elle croyait être un itinérant – la statue – qui dérangeait son quartier tranquille!

Elle se trouve maintenant dans plusieurs grandes villes, dont Rome, où elle a été bénie par le pape. Schmalz aimerait la voir installée dans le plus d’endroits possible et l’imagine d’ailleurs très bien quelque part dans la basse-ville de Québec.

Des « traductions visuelles » d’une vérité éternelle

Dans la lignée des traducteurs bibliques, Schmalz se voit comme quelqu’un qui traduit les idées fortes des saintes Écritures en objets visuels concrets et tactiles avec lesquels on peut même interagir. Cette dimension presque théâtrale et performative est très présente dans plusieurs de ses sculptures : I Absolve You (Je te pardonne) représente Padre Pio dans le rôle d’un confesseur, mais lorsque le passant s’assoit de l’autre côté de la fenêtre, il découvre le visage de Jésus. De même, sa façon de représenter la dernière Cène dans The Last Supper frappe tout d’abord car seul Jésus est attablé. Les passants sont ainsi invités à s’assoir autour de lui, comme pour rappeler aux croyants leur mission apostolique.

Pour Timothy Schmalz, son œuvre en est une d’évangélisation. Sa pièce intitulée Be Welcoming (Soyez accueillants), que l’on peut admirer près de la cathédrale Holy Trinity dans le Vieux-Québec, nous place devant ce qui semble être un pèlerin qui se repose sur un banc. Lorsque le passant s’assoit auprès de lui, il s’aperçoit qu’il s’agit plutôt d’un ange. Celui qui prend le temps de s’attarder peut alors vivre un moment spirituel unique.

Une autre sculpture incontournable de Schmalz peut être observée devant l’Oratoire Saint-Joseph, à Montréal. Elle se trouve également sur la place Saint-Pierre, au Vatican, où elle a aussi été bénie par le pape François. Cette sculpture impressionne par sa taille (20 pieds) et son poids (3,5 tonnes) et fascine quiconque prend le temps de l’observer. Elle représente un groupe de migrants parmi lesquels se cache un ange. L’inspiration provient de la lettre aux Hébreux 13,2 : « N’oubliez pas l’hospitalité ; car, en l’exerçant, quelques-uns ont logé des anges, sans le savoir ».

Bien plus que de l’ornementation

On est loin des pièces qui prennent la poussière dans les musées ou devant lesquelles on passe sans regarder. L’artiste se voit comme un « ambassadeur du christianisme » et dit trouver l’énergie pour poursuivre sa « mission » dans cette soif de spiritualité qu’il ressent dans nos sociétés modernes. Il va même jusqu’à dire qu’il s’agit pour lui d’une forme de publicité, une façon d’attirer la population vers le message du Christ. Le fait que les sculptures soient à l’extérieur des églises, intégrées dans le paysage urbain, en fait une sorte de prêche perpétuel, accessible 24 heures sur 24.

Le message passe par un autre chemin que celui des mots. Il sollicite de manière puissante nos sens et nos émotions. Le sculpteur et son œuvre s’effacent, en quelque sorte, pour ne laisser briller que le sens de la Parole.

Photo : Avec l’aimable collaboration de Timothy Paul Schmalz

Stéphanie Grimard
Stéphanie Grimard

Après avoir enseigné la philosophie au collégial durant plusieurs années, Stéphanie est maintenant journaliste chez nous! Toujours à la recherche du mot juste qui témoignera au mieux des expériences et des réalités qu’elle découvre sans cesse.