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Valérie Laflamme-Caron
Valérie Laflamme-Caron

Valérie Laflamme-Caron

Valérie Laflamme-Caron est formée en anthropologie et en théologie. Elle anime présentement la pastorale dans une école secondaire de la région de Québec. Elle aime traiter des enjeux qui traversent le Québec contemporain avec un langage qui mobilise l’apport des sciences sociales à sa posture croyante.

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  • Canada

    Les chemins de la désillusion : de l’étranger au Canada

    Le mythe de l’eldorado est apparu en Amérique du Sud au 16e siècle et a été relayé par les conquistadors partout en Europe pendant près de 400 ans. Ce mirage a conduit bien des hommes à leur perte. Aujourd’hui, c’est l’Occident qui se dresse telle une cité d’or pour des millions de personnes à la recherche d’une vie meilleure. Qu’elles proviennent de l’Équateur, du Cameroun ou de la Syrie, les personnes qui immigrent au Canada sont nombreuses à vivre une désillusion. Quatre d’entre elles ont accepté de nous partager les aléas de leur intégration à la vie québécoise. Un rêve José et

  • religieuses

    Religieuses au cœur de la pandémie: isolées, mais pas seules

    Le Québec compte actuellement 7 973 religieux et religieuses, ce qui représente 70 % de tous les religieux du Canada. Plus de la moitié d’entre eux sont âgés de plus de quatre-vingts ans. Les couvents, maisons et résidences où ces personnes habitent sont particulièrement vulnérables à la pandémie de Covid. Trois religieuses qui ont dû composer avec l’intrusion du virus dans leurs milieux de vie ont accepté de nous partager comment elles vivent ce temps d’isolement. Sœur Doris Lamontagne est la sœur supérieure des Petites Franciscaines de Marie de Baie-Saint-Paul. Au moment où je m’entretiens avec elle, elle vient de vivre sur Zoom

  • cours

    Les mauvaises connexions : étudier à distance au temps de la covid

    « M’entends-tu ? » « Attends, je vais te rappeler. » « Je crois que ça fonctionne ! » Aucune rencontre en ligne ne commence sans un peu de cafouillage, et mes entrevues avec ces étudiants ne font pas exception. J’ai voulu discuter avec eux de leurs nouvelles réalités scolaires. Même si Édouard, Anne et Raphaël ont des parcours bien différents, ce qu’ils ont à dire à ce sujet se rejoint. La perte d’un milieu de vie Édouard est en première année au cégep. Parce qu’il se passionne pour tout et refusait de choisir, il a débuté cet automne un programme exigeant en sciences, lettres et arts.  « L’école,

  • Soeur Renelle Lasalle

    Koukoumesh : sœur Renelle Lasalle chez les Anicinabek

    Sœur Renelle Lasalle a une montagne à son nom, à Saint-Michel-des-Saints, où elle a fait aménager des pistes de ski en prévision des Jeux du Québec. Élevée par un père alcoolique, elle voulait sauver le monde par le sport. C’est à travers l’éducation physique qu’elle a d’abord accompagné les jeunes sur les chemins du dépassement et de la réconciliation. Cinquante ans plus tard, on connait cette sœur des Saints Cœurs de Jésus et de Marie en Abitibi sous le nom de koukoumesh, « petite grand-mère » en langue anicinabe. Quand elle a croisé des Autochtones pour la première fois, dans les années 1970, sœur Renelle

  • Cercle des fermières

    Ces femmes tissées serrées : le Cercle des fermières de Beauceville

    La réunion mensuelle du Cercle des fermières de Beauceville commence dans l’effervescence. Louise Boucher, présidente, obtient difficilement le silence. L’ordre du jour est chargé : introduction des nouveaux membres, présentation des activités à venir, dégustation de tire d’érable à la pause. Pour lancer la rencontre, François Proulx, séminariste stagiaire à la paroisse, partage une prière qui se termine par ces mots : Combien de mailles comportera le tricot de ma vie ?Dieu seul le sait.Père, donne-moi le courage de terminer mon tricot afin que tu le trouves digne de l’exposition éternelle. Un peu plus de cent ans après sa fondation, en 1916, le

  • soucca

    Une soucca en basse-ville

    J’ai rencontré Paul en 2011, au moment où j’ai emménagé dans mon premier appartement. Il était mon voisin d’en dessous. Le premier soir, ma laveuse a eu un problème qui a provoqué un dégât d’eau dans son logement. J’étais loin de me douter que dix ans plus tard, je partagerais encore, de temps en temps, un café avec lui. Quand il m’a invitée pour la fête de Souccot, je n’ai pas hésité. Afin de revêtir notre rencontre d’une aura de légalité, j’ai mis mon chapeau de journaliste et me suis rendue sur la rue Bayard, dans la basse-ville de Québec.

  • De l’aide pour vivre

    Mise à jour 17/08/20 à 15:00 : Jonathan et ses acolytes lèvent le camp. On a annoncé un plan d’action pour sortir Jonathan du CHSLD et la création d’un groupe de travail afin que Coop Assist puisse voir le jour. J’ai pris connaissance du combat mené par Jonathan Marchand pour les personnes handicapées en octobre 2019. Le Journal de Québec avait titré « Il veut de l’aide pour vivre, pas pour mourir ». On y racontait comment le quotidien de cet homme, qui vit avec la dystrophie musculaire, avait été bouleversé par une pneumonie. J’avais été consternée à la lecture de son témoignage. Sur sa

  • camps de réfugiés

    À l’orée d’un camp de réfugiés au Rwanda

    Nous avons rendez-vous près de l’église afin de rencontrer les enfants du camp de réfugiés de Gihembe. À l’heure convenue, nous les voyons arriver au loin par dizaines. Sac d’école au dos, ils courent le long du sentier qui longe la colline. Ils sont accueillis à bras ouverts par sœur Épiphanie, qui prend des nouvelles de chacun d’eux. Elle secoue la tête en riant : « Tous les enfants de la paroisse sont venus. » Il m’est impossible de distinguer les réfugiés congolais des enfants rwandais. Spontanément, la marmaille se regroupe, tape des mains et entame des chants. À priori, la scène est

  • hôpital Andréanne

    Le tsunami et le verre d’eau

    Andréane Fleury est infirmière clinicienne. Après avoir hésité, elle a décidé d’aller aider ses collègues dans un CHSLD. Elle raconte ici le travail, les défis et les aberrations qu’elle voit au quotidien. Andréane Fleury est infirmière clinicienne depuis plus de dix ans. C’est ce qu’elle a toujours voulu faire de sa vie. Adolescente, elle se voyait envoyée en zone de guerre pour soigner ceux qui en ont le plus besoin. Après avoir mis de côté ce projet pour prioriser sa famille, elle a travaillé à l’urgence, en soins palliatifs et en pédiatrie. Entre la vie et la mort. Depuis un

  • mzungu

    Une mzungu comme les autres

    La veille de notre départ du Rwanda, le père Élie, directeur de l’antenne rwandaise des Œuvres pontificales missionnaires, nous a invités au restaurant. Il voulait nous faire oublier nos tracas en nous faisant découvrir une nouvelle table. Face à notre silence persistant, il a insisté :  « Nous allons au restaurant. Ce n’est pas loin. Vous avez compris ?! » Pour tout dire, nous aurions été prêts à jeuner pour nous rendre directement à l’hôtel. Nous voulions nous connecter au wifi le plus rapidement possible afin de prendre les dernières nouvelles. Nos vols de retour étaient prévus le lendemain. Après avoir quitté Kigali, nous

  • «tout inclus»

    Résister avec résilience à la pandémie

    Je ne pense pas que ça va bien aller. Je n’ai pas l’enthousiasme de mon conseiller financier qui m’invite à acheter des actions au rabais parce que « c’est une pandémie, pas une crise économique ». J’envie la légèreté de ceux qui célèbrent, malgré tout, l’arrivée du printemps.   Je n’ai pas l’optimisme béat, car je pense à tous ces gens qui vont mourir, seuls, face contre terre. À ces malades du cancer qui auraient été habituellement sauvés, mais qui ne pourront pas être opérés à temps. Je pense à mes amis qui viennent de perdre leur emploi et dont l’avenir, à court et

  • Afrique

    L’Afrique, ce grand pays

    C’est dans ces termes que la rédaction du Verbe m’a proposé ce petit contrat de journalisme : « On aimerait t’envoyer en Afrique pour faire un reportage sur les projets des Œuvres pontificales missionnaires. » L’anthropologue en moi a ri en se disant « L’Afrique, ce grand pays… ». Comme l’illustre cette carte conçue par le journaliste britannique Mark Doyle, l’Afrique est un continent aussi grand que la Chine, les États-Unis et l’Inde… rassemblés ensemble. On y trouve un milliard d’habitants répartis dans cinquante-quatre pays et parlant près de deux-mille langues. J’ai évidemment voulu en savoir plus. C’est alors qu’on m’a parlé du Rwanda et de ses

  • «tout inclus»

    La féminité peut-elle être toxique?

    C’est à travers une recherche critique du phénomène qu’on appelait alors l’hypersexualisation que je me suis identifiée, adolescente, au féminisme. Au gala du démérite organisé entre amis à la fin du secondaire, j’ai même reçu le prix de la féministe frustrée. Been there, done that, got the t-shirt. Jusqu’à la fin de mes études en anthropologie, j’aurai consacré l’essentiel de mes travaux scolaires à l’étude de tout ce qui touche de près ou de loin les industries du sexe. J’en ai acquis la certitude qu’en faisant de la sexualité un objet de commerce, nous vivons dans une culture qui déshumanise les

  • Carnaval de Québec

    Carnaval de Québec : fête populaire ou bizness touristique?

    Au fil des siècles, les carnavals de partout dans le monde ont largement débordé des questions de restrictions alimentaires pour devenir des festivités populaires de grande ampleur. Partout, sauf peut-être chez nous avec le Carnaval de Québec. Le terme Carnaval est apparu en français dans les années 1500 et référait à la période qui se trouve entre l’Épiphanie et le Mardi gras. L’expression a pour origine carnelevare, un mot latin formé de carne « viande » et levare « enlever ». C’est ce qu’on fait (entre autres) durant le carême : se priver viande.  Un temps de subversion… On raconte qu’à l’origine, on se réunissait

  • Cadiz

    Le « périmètre festif », c’est Cadiz au complet

    Cela fait une semaine que nous sommes entrés en Carême. Avant d’entamer ces semaines axées sur la prière, le jeûne et l’aumône, certains auront peut-être profité des jours gras. À Cadiz, d’où je vous écris, le Carnaval est une véritable institution. Quand on m’a demandé si, au Canada, nous avions aussi de telles festivités, j’ai répondu « si… pero no ». Il faut dire que le Carnaval de Québec suscite chez moi une profonde indifférence. J’ai d’ailleurs écrit un article à ce sujet: Quand j’écoutais mes parents se remémorer leurs souvenirs carnavalesques, j’étais intriguée par cet événement dont ils se souvenaient par-delà

  • secte

    Qu’est-ce qu’une secte?

    La diffusion du film Les éblouis a fait apparaitre l’expression « secte catholique » dans les médias québécois. Plus près de nous, c’est la Famille Marie-Jeunesse, visée par un recours collectif, qui a été taxée de ce terme. Un ancien membre accuse son fondateur d’être un « gourou » qui aurait abusé physiquement, psychologiquement et spirituellement de ses membres. Quant au film, la réalisatrice puise dans ses souvenirs pour y relater le parcours d’une famille au sein d’une communauté du Renouveau charismatique. À travers le regard de Camille, adolescente, on observe les dérives de ce groupe rassemblé autour du personnage du Berger. Au début des années 2000, les

  • «tout inclus»

    « Ok Boomer », une expression virale arrogante?

    Ok boomer. L’expression a fait les manchettes au cours des derniers jours après que Chlöe Swarbrick, députée néozélandaise, l’ait utilisée en contexte parlementaire. Au moment où elle évoquait l’urgence climatique, un député a rigolé et s’est immédiatement fait rabrouer : « Ok boomer ». Jetons un œil à ce qui se cache derrière cette locution virale. Les grands médias comme le New York Times et le National Post se sont vite emparés de l’affaire néozélandaise. Ils ont décortiqué les tenants et aboutissants de ce mème internet apparu sur l’application Tik Tok à l’été 2018. « Ok Bommer » est une façon de répondre à ceux qui ridiculisent les

  • «tout inclus»

    Marche pour le climat: la peur de perdre

    J’arrive à la marche pour le climat en même temps qu’un cortège du cégep François-Xavier-Garneau. Une cinquantaine de vieux ados chantent en chœur « ceux qui aiment la planète tapent des mains ». Une militante bondit en s’écriant : « j’suis contente »! Alors que, dans les médias, on donne aux militants écologiques le visage d’élèves du secondaire, je peine à les trouver. Autour de moi, je vois des jeunes familles, des groupes syndicaux, des représentants autochtones, des universitaires et même une église protestante. Je tombe finalement sur un premier groupe de jeunes filles âgées de quatorze et quinze ans. Un parent les accompagne. Comme

  • Illustration: © Marie-Pier LaRose.

    Celles qui en ont besoin

    Le 13 mai 1917, au Portugal, la Vierge Marie apparait pour la première fois à trois enfants. Elle leur enseigne une prière: «Ô mon Jésus, pardonnez-nous, préservez-nous du feu de l’enfer; emmenez au Paradis toutes les âmes, surtout celles qui ont le plus besoin.» Les bergers reviendront, accompagnés de foules croissantes, et seront témoins de ce qui sera appelé le Miracle du soleil. Un siècle plus tard, le 13 mai 2016, Catherine tente de mettre fin à sa vie. Elle nous partage le récit de sa renaissance miraculeuse. «J’ai fait quatre tentatives de suicide en tout. Quand j’avais douze ans,

  • Sylvain, Laure et leur fille (photo: Raphaël de Champlain).

    Nos histoires compliquées

    La plupart des jeunes catholiques, comme leurs contemporains, ont vécu des expériences amoureuses de toutes sortes. Ces relations, ponctuées de joies, de peines et de déceptions, les ont façonnés comme hommes et comme femmes. En témoignent un couple et un jeune homme qui nous parlent de leur apprentissage de l’amour, de la sexualité et finalement d’eux-mêmes, et un prêtre qui nous partage le fruit de ses expériences d’accompagnement. Cet article a été publié initialement dans le numéro d’hiver 2019 du Magazine Le Verbe. En chemin Laure et Sylvain vivent leur cinquième année de mariage. Ils ont une petite fille âgée

  • Photo: Mumbai (A. Savin, Wikimedia - CC).

    Visite à Dharavi

    Vue du ciel, Dharavi a l’air d’un amas indistinct de tôle et de boue. De loin, le million de personnes qui y vivent et y travaillent se confondent dans une masse aux contours flous. Pour l’Occidental moyen, le bidonville incarne le summum de la misère. Les personnes qui y habitent ne sont souvent dignes que de pitié. Grâce au tourisme, il est maintenant possible de poser un regard sur cette réalité et, ce faisant, de la reconnaitre comme valable. On qualifie généralement de bidonvilles les quartiers où l’on retrouve une très forte densité de population, un accès restreint aux services publics

  • rwanda

    Le scandale du Rwanda

    Yvon Pomerleau, frère dominicain, a passé plus de vingt ans au Rwanda, où il a pu vivre l’évolution de l’Église et de la société. À son arrivée au «pays des mille collines», en 1968, il portait une vision de l’Afrique héritée, entre autres, des bandes dessinées (Tintin au Congo) de son enfance. L’observation de la nature et des oiseaux – ses loisirs préférés – lui révélaient l’image d’un Dieu bon et tout-puissant. Au moment où il a été placé devant la violence des conflits armés et des déplacements de population, Dieu est davantage devenu une question. [Pour voir la version

  • Kitcisakik

    De Kitcisakik au Vatican

    Octobre 2017. Pendant cinq jours, j’ai accompagné un groupe d’une quinzaine d’élèves en territoire anishinabe. La rencontre de ce peuple des Premières Nations a bousculé nos représentations du Québec. D’un côté, nous avons été émerveillés par les richesses cette culture millénaire. De l’autre, nous avons été bouleversés par les récits souffrants qui ont traversé nos échanges. La très grande majorité des aînés que nous avons rencontrés sont passés par les pensionnats. Ceux qui y ont échappé ont été cachés par leurs parents, avec qui ils se sont enfuis en forêt. Non sans émotion, on nous a décrit les stratagèmes employés

  • ©Marion Desjardins

    Adopte un ado

    Texte de Valérie Laflamme et photos de Marion Desjardins  (parus dans l’édition printemps 2017 du magazine) Nous arrivons à la résidence à 16 h 20, fidèles à nos habitudes. Les élèves déambulent à la queue leu leu dans le grand corridor. Il y a deux ans, leur uniforme scolaire attirait l’attention. Aujourd’hui, ils font partie du décor. À la salle commune de la résidence pour ainés, je dis un mot d’introduction, pour la forme. Marie-Claire, la responsable des loisirs, m’offre un café. Nous nous installons confortablement et contemplons nos protégés, jeunes et vieux: ils sont en grande conversation et n’ont, de toute évidence, pas besoin

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