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Celles qui en ont besoin
Le 13 mai 1917, au Portugal, la Vierge Marie apparait pour la première fois à trois enfants. Elle leur enseigne une prière: «Ô mon Jésus, pardonnez-nous, préservez-nous du feu de l’enfer; emmenez au Paradis toutes les âmes, surtout celles qui ont le plus besoin.» Les bergers reviendront, accompagnés de foules croissantes, et seront témoins de ce qui sera appelé le Miracle du soleil. Un siècle plus tard, le 13 mai 2016, Catherine tente de mettre fin à sa vie. Elle nous partage le récit de sa renaissance miraculeuse. «J’ai fait quatre tentatives de suicide en tout. Quand j’avais douze ans,
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Nos histoires compliquées
La plupart des jeunes catholiques, comme leurs contemporains, ont vécu des expériences amoureuses de toutes sortes. Ces relations, ponctuées de joies, de peines et de déceptions, les ont façonnés comme hommes et comme femmes. En témoignent un couple et un jeune homme qui nous parlent de leur apprentissage de l’amour, de la sexualité et finalement d’eux-mêmes, et un prêtre qui nous partage le fruit de ses expériences d’accompagnement. Cet article a été publié initialement dans le numéro d’hiver 2019 du Magazine Le Verbe. En chemin Laure et Sylvain vivent leur cinquième année de mariage. Ils ont une petite fille âgée
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Rencontre divine chez les Pinkston
Atteint de la paralysie cérébrale, Arouna ne parle pas et est limité dans ses mouvements. À quelques jours de Noël, je suis dans le salon des Pinkston qui me racontent comment leur chemin a croisé divinement celui de ce frêle garçon originaire du Burkina Faso. Robert Pinkston est un homme de Dieu avec une mission particulière : celle de prendre soin des enfants vivant une situation de handicap. Mais il préfère les appeler « des enfants aux besoins spéciaux ». Dans certains pays, ces jeunes garçons et filles n’ont pas le droit de recevoir de soins ni d’éducation ! C’est ainsi que
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Voie divine, voix de diva
Sur scène, Marie-Josée Lord est certes la più granda soprano du Québec, mais autour d’une table, entre un pot-au-feu et un saumon en croute, elle parle piano piano, à mezza-voce. Lorsqu’elle répond à mes questions sur sa foi, sur ce qui l’anime et sur Celui qui l’habite, elle est délicate, feutrée, comme si elle fredonnait un petit air secret qu’elle voulait chanter pour Dieu seul. Elle n’a pas froid à ses yeux bleus. Dès son premier album, en 2010, Marie-Josée Lord affichait ses couleurs à même son livret: «Je suis reconnaissante à l’Éternel Dieu Créateur, à mon Seigneur et Sauveur Jésus Christ qui,
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Charles De Koninck: tout homme est son prochain
Un texte de Maxime Valcourt-Blouin Charles De Koninck, penseur belge d’inspiration thomiste, immigré au Québec dans les années 1930, est une figure aussi incontournable que complexe de la philosophie au Canada francophone. Plus de cinquante ans après son décès, survenu subitement à Rome alors qu’il aidait l’Église à penser son rapport au monde lors de l’aggiornamento du concile Vatican II, l’œuvre colossale du professeur mérite qu’on s’y replonge le plus souvent possible. Au Québec, peu nombreux sont ceux qui connaissent vraiment Charles De Koninck: après la Révolution tranquille, le rejet quasi unanime de la pensée de saint Thomas d’Aquin, et plus généralement du catholicisme, nous
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Au-delà des apparences
Anne-Claire, Ambroise et Joanie sont trois jeunes qui ont compris que l’apparence ne fait pas leur valeur, puisqu’ils ont choisi de vivre leur foi et de se montrer tels qu’ils sont, malgré tout. Malgré l’opinion des parents, de la société ou des amis, malgré les difficultés. Portraits croisés d’une jeunesse qui s’assume. Une enseignante nous racontait, à la suite de son passage dans une école privée, qu’à la rentrée des classes tous les élèves lui semblaient identiques: jupes à carreaux, polos, pantalons noirs. À première vue, rien pour les distinguer: pas de jeans déchirés qui les démarquent du lot, pas
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Le cœur sur la main
«Si vous restez à l’intérieur des corridors marqués par les lignes jaunes, vous êtes en sécurité!» Je partage un regard inquiet avec la photographe, accoutrée comme moi du kit de l’ouvrier (casque, lunettes, dossard et bottes à caps d’acier). François Doré, machiniste, nous reçoit – tout sourire – à l’atelier d’usinage qui l’emploie, en plein quartier industriel à Québec. Son quart de travail tire à sa fin. Ça ne l’empêche pas de prendre tout le temps nécessaire pour bien nous expliquer à quoi sert chacun de ces immenses engins qui meublent son travail quotidien. [Cet article a été publié initialement dans
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Sept fois mieux qu’une Porsche
Pour souligner les cinquante ans de la controversée encyclique Humanae Vitae sur le mariage et la régulation des naissances, publiée en 1968 par le Pape Paul VI, Le Verbe a rencontré Paul-André et Marie, un couple qui a toujours cherché à vivre cette fécondité «au naturel» telle qu’enseignée par l’Église catholique. Si, lorsqu’elle étudiait la médecine, vous aviez dit à Marie qu’elle serait un jour mère au foyer de sept enfants, elle vous ne vous aurait certainement pas cru. De même son mari, qui pensait épouser une future médecin, se voyait davantage au volant d’une Porsche que d’une mini-fourgonnette. Il
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L’homme qui a vu la mort
Quand on écoute le caporal Franck Dupéré raconter son histoire, on se sent tout à coup bien apathique et enfoncé dans la ouate d’une petite vie monotone. Son témoignage a de quoi désarçonner nos peurs, nos lâchetés et nos découragements, et pour cause. Survivre à un kamikaze taliban qui s’explose à deux mètres de soi, on s’en doute, fait éclater des pans de vie en mille morceaux et exige une bonne dose de courage pour se relever. Jusque-là, tout allait bien. Franck, arrivé à ses 16 ans, rêve d’aventure, comme tout jeune de son âge. L’armée devient le lieu tout désigné
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Des éclats d’obus dans l’âme
un texte de Martin Forgues [Cliquez ici pour voir la version papier de cet article publié dans le magazine du printemps 2018, Guerre] La guerre est la plus grande faillite morale de l’Humanité, n’en déplaise aux faucons et aux fanatiques qui ont l’arrogance d’invoquer la volonté divine pour lancer leurs sanglantes conquêtes. On peut souvent entendre ces faux prophètes pervertir Matthieu 10,34 afin de justifier cette soif de sang et de pouvoir, donnant à ce passage l’allure d’un appel aux armes de la part d’un Christ qui, plus tard, demande pourtant aux hommes de s’aimer les uns les autres. Comment le soldat peut-il garder
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Le scandale du Rwanda
Yvon Pomerleau, frère dominicain, a passé plus de vingt ans au Rwanda, où il a pu vivre l’évolution de l’Église et de la société. À son arrivée au «pays des mille collines», en 1968, il portait une vision de l’Afrique héritée, entre autres, des bandes dessinées (Tintin au Congo) de son enfance. L’observation de la nature et des oiseaux – ses loisirs préférés – lui révélaient l’image d’un Dieu bon et tout-puissant. Au moment où il a été placé devant la violence des conflits armés et des déplacements de population, Dieu est davantage devenu une question. [Pour voir la version
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Patrick sur les genoux
On ne comprend pas comment un homme peut supporter de voir sa femme avec un autre. On se dit qu’il est idiot, ou bien qu’il est fou. Je l’ai rencontré, cet homme. Je lui ai parlé longuement, et je peux dire qu’il est tout sauf idiot. Patrick, c’est le mari de Caroline parmi les loups. Celle qui, du jour au lendemain, ne l’aimait plus. Celle qui l’a mis à la porte pour se laisser aller, pendant quatre mois, dans les jeux sadiques et dangereux de son amant. Patrick, pendant ce temps-là, il était sur les genoux. Il n’avait rien vu venir.
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Caroline parmi les loups
[Pour voir la version de cet article publié dans le numéro d’hiver 2018 Amour Libre, cliquez ici.] Il n’y a pas qu’à la guerre, au milieu des massacres à la machette, que l’on peut serrer la main du diable. On peut aussi le faire au bout d’un clavier, quand on veut soudainement changer de vie. Caroline le dit: il était un vrai démon, ce gars-là, et c’est encore le démon – celui du midi, cette fois – qui l’a poussée dans son lit. Mariée depuis deux ans avec Patrick (lire la version de Patrick sur les genoux), elle n’en pouvait plus de
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Des poèmes et des perles: À la rencontre de Roselyne Chevrette
Un texte de Valérie Roberge-Dion [Portrait publié dans la revue d’automne 2016, Vulnérabilité] Roselyne ouvre une petite boite intrigante. Franchement émue, elle y découvre un bracelet précieux, orné d’une ballerine en argent. Une carte accompagne le cadeau, un florilège de mots remplis d’amour. La scène se déroule dans un lieu inusité: au gym! Toute l’équipe du centre de mise en forme Profil, à Québec, a offert un présent à leur membre la plus spéciale. Spéciale parce que trisomique. Spéciale parce que rayonnante. Roselyne Chevrette est épanouie, attentionnée, généreuse. Sa présence, tout en simplicité, a un impact lumineux dans les milieux qu’elle
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Lionel Groulx: sur les épaules d’un géant
Que reste-t-il aujourd’hui de Lionel Groulx, ce géant de notre histoire collective, dans la mémoire des Québécois ? Le nom d’une station de métro et d’un cégep de la banlieue nord de Montréal. Si ce n’est que cela, « nous sommes devenus étrangers à ce qui nous a engendrés », comme me le disait un confrère. René Lévesque l’avait désigné comme l’« un des principaux semeurs de la moisson qui lève aujourd’hui au Québec », Claude Ryan comme « le père spirituel du Québec moderne », Le Devoir, au moment de son décès, l’appelait le « Tacite ou Goethe du Canada français », la revue L’Action nationale, le « père du
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Zoé perdue et retrouvée
Illustrations de Chloé Germain-Thérien Texte de Rose Dufour et de Zoé [Ce bédéreportage a été publié dans le magazine d’hiver 2018] «Est-ce possible de croire que cette réalité existe? Qu’elle existe vraiment? En relisant cette bédé, je me souviens, mon corps se rappelle, mon cœur réagit. Tant d’errance, tant de souffrance à chercher, à vouloir oublier, à me détester. «Je ne savais pas qui j’étais avant même d’avoir commencé à me prostituer. Cachée dans l’ombre, c’est à genoux que je l’ai gagnée, ma dope. Tous les trous miteux que j’ai fréquentés, la cellule que j’ai habitée, toutes ces mains qui m’ont tripotée, qui m’ont souillée…
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McLuhan: l’homme qui avait un message pour l’avenir
Ça fait assez longtemps que je connais Marshall McLuhan sans le connaitre. Vous savez, cet auteur qui attend patiemment, dans notre bibliothèque, que nous lisions enfin ce livre acheté il y a quelques années déjà? Celui que l’on dit avoir lu, dans une discussion entre amis, mais en fait, c’est faux; on ne peut citer que quelques clichés glanés sur la Toile. McLuhan est de ceux-là, et pour plusieurs. Je ne suis pas le seul. Nous pouvons citer: «le média est le message», «le village global», ou «l’informatique est notre nouveau système nerveux central», et nous passons pour un lecteur
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François
«Ça, c’est son cœur, et il n’y a aucune activité. Je suis désolée.» C’est une des phrases qui tournent sans cesse dans ma tête depuis quelques mois déjà. C’est surtout la dernière que nous pensions entendre ce soir-là. En fait, au moment où la technicienne en échographie a prononcé ces quelques mots si lourds et définitifs, elle ne faisait que confirmer ce que personne encore n’avait été capable de nous dire depuis que nous étions arrivés à l’hôpital. Mais nous espérions encore. Nous espérons toujours, d’ailleurs. C’est que, à peine cinq jours plus tôt, ce même petit cœur, j’en avais
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Sortir du trou, être un bon screw
Version numérique du texte publié dans le numéro d’été 2017 du magazine Le Verbe d’été 2017. En prison, c’est la loi de la jungle. Regard sur l’univers hermétique des milieux carcéraux à travers les yeux de deux screws dont la foi a tout changé dans leur façon d’y travailler. Ce n’est pas tous les jours qu’un screw s’ouvre à vous. Pardon! Un «agent des services correctionnels», mieux connu sous le nom de «gardien de prison». Marilyn et François* l’ont fait. Nous avons parlé quelques heures. Nous aurions pu étaler ça sur des jours. Chacun pourrait écrire un livre à sensation, ou
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Le verre à moitié plein des Girard
L’histoire de Jacques et Yvonne n’est pas exactement ce qu’on pourrait appeler une «belle histoire». Dans leur récit s’entremêlent les effluves de fond de tonne et d’encens. Les deux septuagénaires célèbreront cette année 57 ans de mariage, et pourtant, peu de choses les prédisposaient à être ensemble. Jacques et Yvonne se sont rencontrés lors d’une veillée funèbre: présage d’une vie de couple singulière. À quelques pas du défunt commençait une histoire dans laquelle allaient se côtoyer la vie et la mort. En entrant dans leur silencieuse demeure, on ne peut échapper aux nombreux portraits accrochés sur les murs: quatre enfants (dont
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Les vieux pieux
Marie Rose vient d’avoir 93 ans. Jean-Claude s’achemine vers 87 ans. Ils ont 60 ans de mariage, 7 enfants et 27 petits-enfants. Quand ils se retrouvent tous au jour de l’An, au chalet familial, on ajoute les belles-mères, les cousins et les amis, ça fait beaucoup. «On s’est mariés le 24 juin 1957 à la Saint-Jean-Baptiste!» clame Jean-Claude, l’œil d’un bleu brillant, un brin nationaliste. «C’est très symbolique. À cette époque, la Saint-Jean-Baptiste n’était pas une fête nationale; c’était la fête du patron des Canadiens français!» Marie Rose, plus pragmatique peut-être, réplique avec douceur, comme dans un murmure: «C’est surtout parce qu’on savait que tout le
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Shauit, premier reggaeman innu
Shauit, c’est le premier et l’unique reggaeman innu au monde. Il chante en innu-aimun, la langue de ses ancêtres, et aussi en français, en anglais et même en créole, sur les scènes autochtones, québécoises et européennes. Par une prose libre et convaincue, Shauit dépasse les métissages. Il exprime avec une sincérité désarmante l’amour de son peuple, de l’environnement et, enfin, de Dieu. Pour qu’au son du rythme sa quête rejoigne celle de tous ceux qui cherchent aussi leurs racines. Je rencontre Shauit non pas dans une réserve amérindienne, mais en plein cœur du centre-ville de Montréal. Une terrasse, du bruit,
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Premières Nations : le dialogue fait chair
À l’heure où le Canada s’apprête à célébrer son 150e anniversaire de fondation, les Premières Nations de ce vaste pays luttent encore pour leur survie. Victimes d’une politique d’assimilation qui perdure encore aujourd’hui, ses représentants cherchent les racines profondes de leur identité longtemps mise à mal par le gouvernement et par des Églises chrétiennes. Dans ce contexte, des témoins se lèvent pour affirmer que le chemin de la réconciliation et du pardon est possible. Sœur Marie-Laure Simon est l’un d’eux. Sœur Marie-Laure Simon, c.n.d., 88 ans, m’accueille dans un local du Centre d’amitié autochtone de Montréal. Elle s’installe sur une chaise et
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Une vraie libération sexuelle
Une femme cocaïnomane, alcoolique, nymphomane, bisexuelle et anticléricale devient une épouse et une mère de famille catholique épanouie. Brigitte Bédard est une Québécoise qui a eu soif, c’est le moins qu’on puisse dire. Soif de vivre ou de mourir, ça dépend du point de vue qu’on adopte. Alternant entre les lignes de coke, les verres de trop et les partenaires d’un soir, Brigitte a porté en titubant l’étendard de la libération sexuelle et de la haine de l’Église pendant plus d’une dizaine d’années. Brigitte cherchait l’amour de sa vie, sans encore se l’admettre. Après quelques échecs amoureux, elle a, comme
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