-
Chérie, j’ai réduit mon ennemi
La droite méprise la gauche. La gauche déteste la droite. Les fascistes sont en colère contre ceux qui veulent déboulonner les statues de généraux confédérés et contre les antifas, lesquels alimentent parfois la violence qu’ils souhaiteraient pourtant éteindre. Spectacle d’une tristesse inouïe. D’abord, parce qu’une jeune femme a perdu la vie à cause de la colère d’un homme. Ensuite, parce qu’il me semble que, de part et d’autre, on s’affaire plus à démoniser l’adversaire qu’à identifier le véritable Adversaire. La vérité c’est que nous sommes tous des champions pour dénicher la merde dans la vie des autres, dans le camp
-
Salut pop Jésus
À la petite école, on nous a saturés de l’expression «Bonne Nouvelle» dans les cours de catéchèse (ou étaient-ce des cours de bricolage, je ne sais trop). Tellement qu’on ne peut plus entendre ces deux mots sans imaginer madame Ghislaine nous distribuant des silhouettes du Jésus/Ken Barbie à colorier, le teint rose, les sourcils bien épilés et les cheveux blonds, propres comme une pub d’Herbal Essence. Bien sûr que Jésus devait avoir la peau des avant-bras bien douce. Mais est-ce là une caractéristique distinctive du Fils de Dieu? Je connais des tas de bonnes personnes autour de moi qui ont
-
Peut-on aimer toute l’humanité?
Cette année, le peu d’enthousiasme suscité par la fête de la Saint-Jean nous rappelle que le sentiment national n’est pas quelque chose d’acquis. Les nationalistes se désolent de la régression de la ferveur patriotique. D’autres, pour qui le nationalisme est une idéologie exclusiviste et oppressive, s’en réjouissent plus ou moins secrètement. Pour ma part, j’ai une opinion mitigée au sujet du nationalisme. Je peux être en accord avec les nationalistes autant qu’avec leurs adversaires. Je tente d’exposer ma pensée en avançant une série de parallèles entre la nation et la famille. J’ai été marqué par une expression de l’auteur britannique
-
Une belle gang de clowns
Une autre Saint-Jean vient de passer et j’ai l’impression que c’est de mal en pis. Est-ce moi qui n’ai pas le cœur à la fête ou le cœur du peuple n’y est simplement plus ? Ce sentiment d’abattement généralisé, je le perçois à plusieurs niveaux, depuis plusieurs années, et pas seulement à la fête nationale. Je le vois dans les rencontres de famille à Noël, à Pâques, dans certaines soirées d’anniversaires organisées ici et là, dans les spectacles : il n’y a pas de vie, de spontanéité. Bref, c’est plate. D’aucuns – et j’en suis – voudraient faire porter l’odieux
-
Pécheurs anonymes
Quelqu’un m’annonçait récemment qu’il allait en thérapie pour mettre fin à sa dépendance à l’alcool. Il me disait que plusieurs déceptions vécues dans les derniers mois l’avaient amené à boire davantage. Alors que c’était une affaire plutôt sociale (malgré l’excès à chaque fois inévitable), c’est devenu pour lui une habitude quotidienne et solitaire. J’ai bien sûr encouragé cette personne à y aller, déclarant que c’était un luxe, dans notre société actuelle, de tout quitter pendant un mois et de sacrifier du temps précieux (et du temps, c’est de l’argent) pour prendre soin de son âme. Les thérapies, si elles sont
-
Le labour sans labeur
Le Canada serait appelé à devenir un joueur majeur dans les secteurs de la robotisation et de la malnommée « intelligence artificielle ». Drôle de destin. J’imagine que ce n’est pas exactement ce que Champlain, Jeanne-Mance et Cartier avaient en tête lorsqu’ils se sont tapé la grande traversée… Quoi qu’il en soit, la Banque du Canada annonçait ce printemps que les vingt prochaines années seraient dédiées à l’innovation technologique et à l’automatisation. La sous-gouverneure de l’institution, Carolyn Wilkins, expliquait toutefois que ces changements majeurs – maladroitement appelés « progrès » technologiques – allaient non seulement couter de nombreux emplois, mais aussi augmenter les inégalités
-
Merci de me laisser être en désaccord
Samedi dernier, dans La Presse, Patrick Lagacé proposait une plus grande ouverture de la loi sur l’aide médicale à mourir. Dans l’article « Merci de me laisser partir », on ne retrouve pas un exposé théorique, des arguments rationnels ni une suite de raisonnements appuyés par des études et des chiffres. Non. Il a plutôt rapporté le témoignage de Margo Ménard, la mère de feu Sébastien Gagné-Ménard, un Québécois atteint de sclérose en plaques qui s’est tout récemment rendu en Suisse pour se donner la mort. Et le journaliste de terminer son article par cette simple question : « pourquoi empêcherait-on les Sébastien Gagné-Ménard de
-
Montréal, mon culinaire
Vu de Québec, le 375e de Montréal me fait autant d’effet que l’anniversaire de 3 ans et 9 mois de ma chère fille : faut vraiment se péter les joues à gonfler des ballounes pour ça? Mais si ça vous divertit un peu, si ça change le mal de place, si ça met un baume sur votre Coderre, si ça vous donne l’impression d’être à Régisgrad le temps d’un été, je vous dis comme le pape François : « qui suis-je pour juger? ». Faites ce qui vous plait avec l’oseille du peuple, on n’est pas regardants. On serait bien malvenus de vous faire
-
Bénir le cours d’éducation sexuelle?
Le cours d’éducation sexuelle cogne aux portes de nos écoles, et certains parents religieux se sont mis à avoir peur, ou bien à faire peur aux autres. «Je suis inquiète, me dit une maman, dans quel monde mes enfants vont-ils grandir?» Je sais. Faudrait que je saute aux barricades, que je manifeste devant le parlement, et que le jour venu, je sorte mon enfant de la classe. En vérité, je vous le dis: Been there, Done that, Got the T-shirt. Quand le cours d’Éthique et de culture religieuse (ECR) a été implanté, malgré 4 ans de lutte acharnée, on a
-
Pharisiens, sceptiques et Calinours
On trouve toutes sortes de gens en Église. Des jeunes, des vieux. Des tristes, des joyeux. Des doux, des durs. Des modestes, des ambitieux. Des cons, des saints. Et tous ces gens, ils vivent la foi de façons différentes. Certains sont simples dans une discrète foi du cœur au quotidien. D’autres sont plus cérébraux avec une foi structurée par l’intellect. D’autres encore sont motivés par une foi militante au sein de leurs communautés. À travers cette diversité, j’en suis venu à discerner trois grandes dérives en Église. Il y en a d’autres, mais celles-ci me semblent spécialement importantes. Je précise
-
François à la rencontre des autochtones du Canada?
L’année 2017 sera particulièrement effervescente pour le Québec et le Canada : la grande métropole québécoise, Montréal, fête son 375e anniversaire de fondation, alors que la confédération canadienne célèbre ses 150 ans d’existence. En raison de son héritage manifestement catholique, l’actuel maire de Montréal, Denis Coderre, a fait des pieds et des mains en 2015 pour inviter le pape François à venir fêter le 375e. Il s’est même rendu à l’une de ses audiences générales pour lui en faire la demande expresse. En vain. Si l’évêque de Rome a décliné l’offre, tout porte à croire que c’est plutôt la cause des
-
Le malaise québécois
Le 20 mars dernier, le magazine canadien-anglais Maclean’s s’est encore une fois proposé de recenser dans un article les vices de la société québécoise. À partir de quelques prémisses qui incluent une tempête de neige et une autoroute bloquée, le chroniqueur Andrew Potter* en conclut à un profond malaise social au Québec. On s’en doute, l’article a reçu un accueil glacial dans la Belle Province. Le premier ministre a parlé de « préjugés » véhiculés dans « un texte de mauvaise qualité » alors que François Legault, chef de la CAQ, l’a éloquemment qualifié de « torchon ». Si l’auteur s’est rapidement rétracté et a présenté
-
« Le 13e » ou réformer la répression
*** NDLR: ce texte contient quelques divulgâcheurs. *** Commençons doucement. Voici quelques stats. Les États-Unis d’Amérique pèsent pour 5% de la population mondiale. Puis, 25%. C’est la proportion, toujours au niveau planétaire, de personnes incarcérées au pays de la Liberté. Et alors que les hommes noirs ne représentent que 6,5% de la population étatsunienne, ils correspondent à 40,2% de la population carcérale. Un homme noir sur trois ira en prison au moins une fois dans sa vie, alors que pour les Blancs, c’est un sur dix-sept. Documentaire-choc Voilà quelques-unes des données qui ont poussé Ava DuVernay à réaliser 13th. Le
-
Lettre à Catherine Dorion (pis à KPMG, tant qu’à faire)
Ceux qui cherchent à tout prix à honorer notre passé catholique, s’ils veulent le faire sincèrement, devraient lâcher les crucifix et nous rappeler ce que disait Jésus sur les riches, et nous rappeler aussi, tant qu’à faire, ce que disait Jésus sur ceux qui défendent la religion juste pour les apparences, juste pour se tailler une place dans le monde. Catherine Dorion, comédienne et blogueuse au Journal de Québec (citation tirée de Facebook, 3 mars 2017, en réponse à l’indignation à géométrie variable de certains québécois) – Catherine Dorion, comédienne et blogueuse au Journal de Québec (citation tirée de Facebook,
-
Dompter la bête
C’est un peu toujours la même histoire. Un évènement tragique secoue une ville. Les grandes chaines d’information dépêchent des équipes sur le terrain. Les médias sociaux s’enflamment. Dans les heures qui suivent, même si on ne sait toujours à peu près rien sur les motifs de la tuerie, plusieurs articles se bousculent dans notre fil de nouvelles… alors que des victimes luttent encore pour leur vie aux soins intensifs. La poussière Tous ces camions-antenne qui couvrent la nouvelle et toutes ces voitures de police déployées dans la ville soulèvent beaucoup de poussière sur Québec. Les analyses hâtives lancées dans ce brouillard
-
Bienvenue à Écono-land
« Nous ne suggérons pas que les patients et les médecins considèrent le cout lorsqu’ils prennent la décision – très personnelle et intime – de demander l’aide médicale à mourir, insiste le Dr Trachtenberg. Mais la réalité est telle que notre système de santé a des ressources limitées et que les décideurs se servent toujours d’évaluations économiques pour décider s’ils offriront un service. » C’est ainsi que se termine un article de Radio-Canada intitulé L’État pourrait faire des économies grâce à l’aide médicale à mourir. Les groupes de médecins contre l’euthanasie, certains organismes (sans affiliation religieuse) de promotion de la dignité de
-
Vous pleuriez? Dansez maintenant
Lorsqu’arrive une fête, paradoxalement, je me sens toujours d’humeur morose. Peut-être est-ce mon côté idéaliste qui se déçoit que la fête ne soit pas célébrée à mon goût. Ou alors est-ce parce que je m’attriste de n’être pas moi-même assez prêt ou joyeux. Fin de la psychanalyse. Bref, le 31 décembre, je n’étais pas dans mon assiette. Ma copine – qui a l’amour d’endurer ma face d’enterrement – me propose d’aller au cinéma avant d’aller nous préparer pour la veille du Jour de l’An. Je me suis dit que ça allait peut-être me changer les idées. Tomber dans un piège
-
Et si nous vivions déjà dans un monde idéal?
J’ai récemment visionné le film Brave New World (v.f. Le Meilleur des Mondes), réalisé en 1998. Ce film est basé sur le roman du même nom, écrit en 1931 par Aldous Huxley, qui présente une vision dystopique* de ce que notre société pourrait devenir. J’ai grandement apprécié la réalisation de ce film et je pense que, comme le roman, il pose une série de questions cruciales pour notre avenir. Voici quelques points saillants de la dystopie décrite par Huxley : Les enfants sont fabriqués dans des cuvettes plutôt qu’engendrés naturellement; Toutes les femmes sont stérilisées en permanence; La génétique est méticuleusement
-
Salvifique vulnérabilité
La mort. La mort universelle, sans discrimination. Voilà la seule certitude des agnostiques. Nous allons tous mourir un jour. Mais si cette vérité pouvait être à son tour ébranlée? Si l’immortalité était tout juste à notre portée? Tuer la mort Face à la mort, l’homme se révolte. C’est injuste ! Je ne suis pas fait pour mourir ! De fait, il y a quelque chose en moi qui aspire à toujours plus. Il y a en moi un désir d’éternité. Si je meurs, tout prendra fin. Si je meurs, les meilleures choses frapperont le mur de l’absurde. À quoi bon
-
Kintsugi
Kintsugi : en japonais, jointure en or. Méthode de réparation des porcelaines et des céramiques brisées au moyen de laque faite de poudre d’or. En amour comme en céramique, tout passe. Tout casse. * Il y a 11 ans aujourd’hui, un 11 novembre, on frenchait pour la première fois, assis sur un trottoir de Sainte-Foy, au milieu de la nuit. Ensuite, pendant 2 ans, le stationnement chez tes parents fera office de parloir. Et la poutine du Ashton, celui juché en haut de la rue de la Suète, sera l’exutoire de nos élans passionnels maladroitement contenus. Puis, le grand jour. Puis
-
Safia Nolin n’est pas Plume Latraverse
J’écoutais Simon Jodoin au micro du 15-18 de Radio-Canada. Il faisait la comparaison flatteuse (et fortuite, semble-t-il) entre Plume et Safia. Voilà, effectivement, deux chanteurs québécois qui remettent en question l’ordre établi. À la différence près, je dirais, que Plume n’est pas surpris lorsque son irrévérence est conspuée sur la place publique. Sincèrement, je suis d’accord avec Safia sur plusieurs des idées qu’elle porte… aussi élégamment qu’un t-shirt de Gerry Boulet. Si certaines de ses opinions sont plus difficiles à endosser sans vérification préalable (sa sœur serait une « grosse conne »), d’autres, néanmoins, sont plutôt aisées à partager. Par exemple : Safia Nolin a
-
Joseph contre les robots
Un peu plus tôt cet automne, je m’asseyais avec mon fils de huit ans pour regarder avec lui ses premiers devoirs de troisième année. Ça vaut toujours la peine de prendre un peu de temps pour échanger avec les enfants sur ce qu’ils apprennent en classe… Tant bien que mal, je tente d’appliquer dans ma vie familiale ce qui me semble être aussi un principe valable pour l’enseignement: il ne peut y avoir de transmission sans amour, sans un don. Dans cet état d’esprit, j’ouvre avec lui un joli petit manuel: L’école d’hier, l’école de demain. Ça promet. Évidemment, dans
-
… et pour le pire
Le mal est fait : chaque personne que je croise jette sur moi un regard compatissant, convaincue que notre voyage de noces a été un désastre. Rassurez-vous : ce n’est pas le cas. Nous avons vu des paysages magnifiques, redécouvert l’histoire de l’Amérique et adopté un rythme de vie plus reposant qu’il n’y parait. En vous partageant les épreuves rencontrées sur la route, je souhaitais aller au-delà des clichés de voyage qu’on brandit de manière triomphante. L’inconfort, la frustration, le ras-le-bol : ça fait partie de la vie, même de celle des nouveaux mariés. La même partition Vivre dans la promiscuité d’un minivan
-
La purée de pois(se)
Suite du texte Mon maudit voyage de noces. On trouve très peu de campings dans les environs de Monument Valley, situé sur le territoire Navajo, en Utah. Tout, ici, semble fait pour les VR. C’est pourquoi ce terrain de la ville de Mexican Hat me semblait être une bonne option. Sur Google map, il était délimité par une zone de couleur verte. J’imaginais une oasis au milieu du désert. Arrivés à destination, nous sommes déçus de constater qu’il s’agit d’un piètre endroit où passer la nuit. Le terrain de camping est en fait un stationnement. La vue donne sur une
Page précédente