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  • Aimer son corps comme soi-même

    Dans une lettre d’opinion publiée le 11 mai par Le Devoir, l’écrivaine Martine Delvaux dénonce les codes et les normes vestimentaires des écoles québécoises. En plus de cibler les jeunes filles, cette pudibonderie cacherait en fait, selon l’auteure, l’incapacité des adultes (c.-à-d. les enseignants) de voir les corps autrement que comme un objet de désir sexuel. On retrouve toutefois une certaine confusion dans le propos de Mme Delvaux, ce qui n’aide pas le débat sur la présence de codes vestimentaires dans nos écoles et sur notre rapport au corps en général.   Notons d’abord que les codes vestimentaires sont généralement

  • Les saints ne sont pas des anges

    Je donne toujours ce conseil aux nouveaux époux: Disputez-vous autant que vous le voulez. Si les assiettes volent, laissez-les. Mais ne laissez jamais la journée finir sans faire la paix! – Pape François Il y a de ces moments où on dirait que rien ne fonctionne. Hier soir, on rêvait de coucher les enfants à une heure décente, on fantasmait à l’idée d’un peu de quiétude autour de la table du souper et, d’une manière plus fantaisiste encore, on espérait que la recherche d’une paire de bobettes propres pour A. (6 ans) qui sort du bain ne se transforme pas en fouille

  • Mépriser les parents

    L’éducation sexuelle en milieu scolaire peut-elle être comparée à l’enseignement des mathématiques ? L’école a-t-elle la prérogative de l’éducation des enfants ou devrait-elle se limiter à soutenir le projet éducatif des parents ? Notre collaborateur répond ici à l’éditorial d’Alexandre Sirois, publié hier dans La Presse. Monsieur Sirois, Comment réagiriez-vous si vous appreniez que l’on enseigne à votre enfant à tirer de la carabine à l’école primaire ? Absurde, n’est-ce pas ? On pourrait penser qu’il relève du jugement des parents de décider quand, avec qui et de quelle manière leur enfant devrait-il être initié à la carabine. Vous me direz que

  • Sommes-nous encore capables d’attendre?

    Le carême 2018 a quelque chose d’anachronique. Alors que se déroulait ces jours-ci à Austin (Texas) le fameux pèlerinage de technophiles SXSW, l’Église catholique, jamais vraiment de son temps, propose une lente et pénible montée vers le calvaire. D’un côté, les jeunes élites mondiales de l’intelligence artificielle, du capital de risque et du bitcoin se shootaient au high-speed, la tête dans le cloud. De l’autre, une institution aux allures archaïques se prépare à faire mémorial d’un évènement qui commence à dater: un homme exécuté non pas avec un sabre laser, mais cloué sur un bout de bois; vraisemblablement revenu du

  • Les choses que l’on peut dire

    Un prof de cégep peut-il exprimer, hors de sa classe, ses réserves et ses questionnements sur l’homosexualité? C’est là l’une des nombreuses questions que soulève la récente suspension de Jean Laberge, enseignant au Vieux-Montréal. Le 17 janvier dernier, le philosophe Jean Laberge publiait le billet « Suis-je homophobe? » sur sa page Facebook. Quelques jours plus tard, à la suite de plaintes de collègues et d’étudiants, il rencontre la direction de l’établissement et écope d’une suspension (avec solde) en attendant les sanctions officielles. Si le nom de Jean Laberge vous dit quelque chose, vous savez probablement déjà que le prof de philo du cégep

  • Prendre soin de la poule

    Dans son récent papier au Devoir, Francine Pelletier n’a pas tout faux, vous savez. J’ai voulu en savoir plus sur la « politique nataliste » de la CAQ. Je n’ai rien trouvé, sauf le discours du chef. En le lisant, j’ai soupiré de lassitude. Encore une fois, on veut « travailler à éliminer les différents obstacles financiers qui se dressent devant les familles du Québec qui désirent avoir un enfant ». On veut diminuer les impôts des familles, car « quand vient le moment où les couples souhaiteraient avoir d’autres enfants, ils y renoncent souvent ». On veut aider les familles parce que vous savez, « une

  • La Toussaint avec Bloy

    Tu es béni, Père,Seigneur du ciel et de la terre,tu as révélé aux tout-petitsles mystères du Royaume!– Mt 11, 25 Cher ami, Nous ne nous connaissions que depuis quelque temps lorsque tu m’as tendu un vieil exemplaire de poche de La femme pauvre de Léon Bloy. Fidèle trop catholique pour le milieu des lettres et écrivain trop libre pour les bons chrétiens des premiers bancs, Bloy avait su confisquer ton attention académique, au moins le temps qu’il te fallait pour devenir Maitre ès Pèlerin de l’absolu. Pour ma part, autant rebuté par la couverture d’un bleu défraichi illustrée par un

  • J’aurais pas voulu être un artiste…

    J’étais sous le choc de voir déferler les #moiaussi des victimes de quelques grands du show-business, mais la sortie de Léa Clermont-Dion m’a fouettée jusqu’aux os, car son récit, si vous avez la chance de le lire, est un arrache-cœur. L’agression sexuelle m’a choquée, évidemment, mais ce qui m’a clouée sur ma croix, c’est le rôle de Lise Payette dans tout ça. Ce matin, je ne suis plus clouée, je suis carrément crucifiée par la déclaration de Luc Plamondon à une journaliste d’un site à potins du showbizz québécois: «J’ai trouvé ça génial que les femmes sortent et dénoncent la

  • #Balance ton steak

    La campagne #BalanceTonPorc connait un franc succès sur les réseaux sociaux. Évidemment, c’est dégoutant et regrettable de constater à quel point un nombre incalculable de personnes, surtout des femmes, se font harceler et agresser. Si le problème semble particulièrement présent dans le monde du showbiz – au moment d’écrire ces lignes, La Presse nous apprend que même l’étoile polaire du vedettariat québécois aurait harcelé plusieurs personnes au cours de sa carrière –, il ne s’y limite pas. Gigot et abats Alors que certaines dénoncent « les religions » d’avoir nourri la bête du patriarcat et de la domination sexuelle pendant des siècles, d’autres

  • À la recherche des forces de l’adversaire

    L’essence de la politique est de faire tenir ensemble une pluralité d’éléments distincts au sein d’une communauté singulière. Toute communauté politique est effectivement en proie à des conflits d’opinion importants et elle se définira par la manière dont elle peut représenter et traiter ces dissensions. Alors que des tensions sur la question identitaire et « raciale » se font de plus en plus grandes au sein de certaines sociétés occidentales – incluant le Québec –, il faut retrouver de façon urgente une compréhension adéquate du dialogue politique. D’aucuns analysent aujourd’hui la montée de l’extrême-droite politique qui, sans constituer un bloc monolithique, mettrait de l’avant

  • Chérie, j’ai réduit mon ennemi

    La droite méprise la gauche. La gauche déteste la droite. Les fascistes sont en colère contre ceux qui veulent déboulonner les statues de généraux confédérés et contre les antifas, lesquels alimentent parfois la violence qu’ils souhaiteraient pourtant éteindre. Spectacle d’une tristesse inouïe. D’abord, parce qu’une jeune femme a perdu la vie à cause de la colère d’un homme. Ensuite, parce qu’il me semble que, de part et d’autre, on s’affaire plus à démoniser l’adversaire qu’à identifier le véritable Adversaire. La vérité c’est que nous sommes tous des champions pour dénicher la merde dans la vie des autres, dans le camp

  • Salut pop Jésus

    À la petite école, on nous a saturés de l’expression «Bonne Nouvelle» dans les cours de catéchèse (ou étaient-ce des cours de bricolage, je ne sais trop). Tellement qu’on ne peut plus entendre ces deux mots sans imaginer madame Ghislaine nous distribuant des silhouettes du Jésus/Ken Barbie à colorier, le teint rose, les sourcils bien épilés et les cheveux blonds, propres comme une pub d’Herbal Essence. Bien sûr que Jésus devait avoir la peau des avant-bras bien douce. Mais est-ce là une caractéristique distinctive du Fils de Dieu? Je connais des tas de bonnes personnes autour de moi qui ont

  • Peut-on aimer toute l’humanité?

    Cette année, le peu d’enthousiasme suscité par la fête de la Saint-Jean nous rappelle que le sentiment national n’est pas quelque chose d’acquis. Les nationalistes se désolent de la régression de la ferveur patriotique. D’autres, pour qui le nationalisme est une idéologie exclusiviste et oppressive, s’en réjouissent plus ou moins secrètement. Pour ma part, j’ai une opinion mitigée au sujet du nationalisme. Je peux être en accord avec les nationalistes autant qu’avec leurs adversaires. Je tente d’exposer ma pensée en avançant une série de parallèles entre la nation et la famille. J’ai été marqué par une expression de l’auteur britannique

  • Une belle gang de clowns

    Une autre Saint-Jean vient de passer et j’ai l’impression que c’est de mal en pis. Est-ce moi qui n’ai pas le cœur à la fête ou le cœur du peuple n’y est simplement plus ? Ce sentiment d’abattement généralisé, je le perçois à plusieurs niveaux, depuis plusieurs années, et pas seulement à la fête nationale. Je le vois dans les rencontres de famille à Noël, à Pâques, dans certaines soirées d’anniversaires organisées ici et là, dans les spectacles : il n’y a pas de vie, de spontanéité. Bref, c’est plate. D’aucuns – et j’en suis – voudraient faire porter l’odieux

  • Pécheurs anonymes

    Quelqu’un m’annonçait récemment qu’il allait en thérapie pour mettre fin à sa dépendance à l’alcool. Il me disait que plusieurs déceptions vécues dans les derniers mois l’avaient amené à boire davantage. Alors que c’était une affaire plutôt sociale (malgré l’excès à chaque fois inévitable), c’est devenu pour lui une habitude quotidienne et solitaire. J’ai bien sûr encouragé cette personne à y aller, déclarant que c’était un luxe, dans notre société actuelle, de tout quitter pendant un mois et de sacrifier du temps précieux (et du temps, c’est de l’argent) pour prendre soin de son âme. Les thérapies, si elles sont

  • Le labour sans labeur

    Le Canada serait appelé à devenir un joueur majeur dans les secteurs de la robotisation et de la malnommée « intelligence artificielle ». Drôle de destin. J’imagine que ce n’est pas exactement ce que Champlain, Jeanne-Mance et Cartier avaient en tête lorsqu’ils se sont tapé la grande traversée… Quoi qu’il en soit, la Banque du Canada annonçait ce printemps que les vingt prochaines années seraient dédiées à l’innovation technologique et à l’automatisation. La sous-gouverneure de l’institution, Carolyn Wilkins, expliquait toutefois que ces changements majeurs – maladroitement appelés « progrès » technologiques – allaient non seulement couter de nombreux emplois, mais aussi augmenter les inégalités

  • Merci de me laisser être en désaccord

    Samedi dernier, dans La Presse, Patrick Lagacé proposait une plus grande ouverture de la loi sur l’aide médicale à mourir. Dans l’article « Merci de me laisser partir », on ne retrouve pas un exposé théorique, des arguments rationnels ni une suite de raisonnements appuyés par des études et des chiffres. Non. Il a plutôt rapporté le témoignage de Margo Ménard, la mère de feu Sébastien Gagné-Ménard, un Québécois atteint de sclérose en plaques qui s’est tout récemment rendu en Suisse pour se donner la mort. Et le journaliste de terminer son article par cette simple question : « pourquoi empêcherait-on les Sébastien Gagné-Ménard de

  • Montréal, mon culinaire

    Vu de Québec, le 375e de Montréal me fait autant d’effet que l’anniversaire de 3 ans et 9 mois de ma chère fille : faut vraiment se péter les joues à gonfler des ballounes pour ça? Mais si ça vous divertit un peu, si ça change le mal de place, si ça met un baume sur votre Coderre, si ça vous donne l’impression d’être à Régisgrad le temps d’un été, je vous dis comme le pape François : « qui suis-je pour juger? ». Faites ce qui vous plait avec l’oseille du peuple, on n’est pas regardants. On serait bien malvenus de vous faire

  • Bénir le cours d’éducation sexuelle?

    Le cours d’éducation sexuelle cogne aux portes de nos écoles, et certains parents religieux se sont mis à avoir peur, ou bien à faire peur aux autres. «Je suis inquiète, me dit une maman, dans quel monde mes enfants vont-ils grandir?» Je sais. Faudrait que je saute aux barricades, que je manifeste devant le parlement, et que le jour venu, je sorte mon enfant de la classe. En vérité, je vous le dis: Been there, Done that, Got the T-shirt. Quand le cours d’Éthique et de culture religieuse (ECR) a été implanté, malgré 4 ans de lutte acharnée, on a

  • Pharisiens, sceptiques et Calinours

    On trouve toutes sortes de gens en Église. Des jeunes, des vieux. Des tristes, des joyeux. Des doux, des durs. Des modestes, des ambitieux. Des cons, des saints. Et tous ces gens, ils vivent la foi de façons différentes. Certains sont simples dans une discrète foi du cœur au quotidien. D’autres sont plus cérébraux avec une foi structurée par l’intellect. D’autres encore sont motivés par une foi militante au sein de leurs communautés. À travers cette diversité, j’en suis venu à discerner trois grandes dérives en Église. Il y en a d’autres, mais celles-ci me semblent spécialement importantes. Je précise

  • François à la rencontre des autochtones du Canada?

    L’année 2017 sera particulièrement effervescente pour le Québec et le Canada : la grande métropole québécoise, Montréal, fête son 375e anniversaire de fondation, alors que la confédération canadienne célèbre ses 150 ans d’existence. En raison de son héritage manifestement catholique, l’actuel maire de Montréal, Denis Coderre, a fait des pieds et des mains en 2015 pour inviter le pape François à venir fêter le 375e. Il s’est même rendu à l’une de ses audiences générales pour lui en faire la demande expresse. En vain. Si l’évêque de Rome a décliné l’offre, tout porte à croire que c’est plutôt la cause des

  • Le malaise québécois

    Le 20 mars dernier, le magazine canadien-anglais Maclean’s s’est encore une fois proposé de recenser dans un article les vices de la société québécoise. À partir de quelques prémisses qui incluent une tempête de neige et une autoroute bloquée, le chroniqueur Andrew Potter* en conclut à un profond malaise social au Québec. On s’en doute, l’article a reçu un accueil glacial dans la Belle Province. Le premier ministre a parlé de « préjugés » véhiculés dans « un texte de mauvaise qualité » alors que François Legault, chef de la CAQ, l’a éloquemment qualifié de « torchon ». Si l’auteur s’est rapidement rétracté et a présenté

  • « Le 13e » ou réformer la répression

    *** NDLR: ce texte contient quelques divulgâcheurs. ***  Commençons doucement. Voici quelques stats. Les États-Unis d’Amérique pèsent pour 5% de la population mondiale. Puis, 25%. C’est la proportion, toujours au niveau planétaire, de personnes incarcérées au pays de la Liberté. Et alors que les hommes noirs ne représentent que 6,5% de la population étatsunienne, ils correspondent à 40,2% de la population carcérale. Un homme noir sur trois ira en prison au moins une fois dans sa vie, alors que pour les Blancs, c’est un sur dix-sept. Documentaire-choc Voilà quelques-unes des données qui ont poussé Ava DuVernay à réaliser 13th. Le

  • Lettre à Catherine Dorion (pis à KPMG, tant qu’à faire)

    Ceux qui cherchent à tout prix à honorer notre passé catholique, s’ils veulent le faire sincèrement, devraient lâcher les crucifix et nous rappeler ce que disait Jésus sur les riches, et nous rappeler aussi, tant qu’à faire, ce que disait Jésus sur ceux qui défendent la religion juste pour les apparences, juste pour se tailler une place dans le monde. Catherine Dorion, comédienne et blogueuse au Journal de Québec (citation tirée de Facebook, 3 mars 2017, en réponse à l’indignation à géométrie variable de certains québécois) – Catherine Dorion, comédienne et blogueuse au Journal de Québec (citation tirée de Facebook,

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